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Contes fantastiques I

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Les poĂštes eux-mĂȘmes ne passent pas pour ĂȘtre tous les jours braves, depuis qu'Horace a fait l'aveu d'avoir abandonnĂ© son bouclier ; mais il n'en Ă©tait pas ainsi d'Hoffmann. Il Ă©tait Ă  Dresde Ă  l'Ă©poque critique oĂč cette ville, sur le point d'ĂȘtre prise par les AlliĂ©s, fut sauvĂ©e par le retour soudain de Bonaparte et de sa garde. Il vit alors la guerre de prĂšs, et s'aventura plusieurs fois Ă  cinquante pas des tirailleurs français, qui Ă©changeaient leurs balles, en vue de Dresde, avec celles des AlliĂ©s. Lors du bombardement de cette ville, une bombe Ă©clata devant la maison oĂč Hoffmann Ă©tait avec le comĂ©dien Keller, le verre Ă  la main, et regardant d'une fenĂȘtre Ă©levĂ©e les progrĂšs de l'attaque. L'explosion tua trois personnes, Keller laissa tomber son verre ; mais Hoffmann, aprĂšs avoir vidĂ© le sien : « Qu'est-ce que la vie ? s'Ă©cria-t-il philosophiquement ; et combien est fragile la machine humaine, qui ne peut rĂ©sister Ă  un Ă©clat de fer brĂ»lant ! » Extrait : Ce violon, me dit Crespel, est un morceau merveilleux d'un artiste inconnu, qui vivait sans doute du temps de Tartini. Je suis convaincu qu'il y a dans sa construction intĂ©rieure quelque chose de particulier, et qu'un secret, que je poursuis depuis longtemps, se dĂ©voilera Ă  mes yeux, lorsque je dĂ©monterai cet instrument. Riez de ma faiblesse si vous voulez ; mais cet objet inanimĂ© Ă  qui je donne, quand je le veux, la vie et la parole, me parle souvent d'une façon merveilleuse, et lorsque j'en jouai pour la premiĂšre fois, il me sembla que je n'Ă©tais que le magnĂ©tiseur qui excite le somnambule, et l'aide Ă  rĂ©vĂ©ler ses sensations cachĂ©es. Vous pensez bien que cette folie ne m'a jamais occupĂ© sĂ©rieusement, mais il est Ă  remarquer que je n'ai jamais pu me dĂ©cider Ă  dĂ©truire cette sotte machine. Je suis content aujourd'hui de ne pas l'avoir fait ; car, depuis qu'Antonie est ici, je joue quelquefois de ce violon devant elle. Antonie l'Ă©coute, avec plaisir, avec trop de plaisir !