« …Et sous ses pieds, la dalle. Cette dalle dont il connaissait chaque détail de la partie inférieure ! Cette dalle dont le haut le hanta plusieurs jours durant ! Cette dalle qui aurait pu changer le visage du monde, si seulement elle s’était trouvée cinquante centimètres plus loin ! Fatalité lisse et pétrifiée qui ne pardonne rien, pas plus aujourd’hui qu’hier… Il imagine ses bras tendus vers d’incertaines prises, la sueur dégoulinant de son front, les muscles crispés à se rompre, le souffle coupé, un dernier doute et la roche polie par les siècles, sans la moindre aspérité à laquelle suspendre, pour une seconde encore, une vie qui s’échappe. Cette roche impitoyable sous ses doigts devenus insensibles, étrangers, une vision fugitive du firmament et un pied qui soudain se dérobe, sans cri ni étonnement, un moment d’apesanteur puis le frottement décapant et indolore du corps sur le granit, une joue qui s’arrache et l’inévitable basculement, le cours des choses qui s’accélère – ou qui ralentit – le temps mis à l’épreuve et un regard interrogateur lancé vers le ciel qui recule et tournoie, l’ivresse inespérée de l’abandon, l’apaisement d’avoir mené avec droiture sa dernière course, son ultime combat… » Placée au cœur de l’action de « La densité du vide », la montagne est le tremplin de ce récit poignant où l’aventure est d’abord intérieure. Gladys, Jean-Charles, Pierre et Michel ne se connaissent pas. Tout les oppose quand l’imprévu va sceller leurs existences…