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Les Combattants du petit bonheur

E-book


Le chef d'oeuvre de Boudard, couronné par le Prix Renaudot.

Rois de la débrouille, ces combattants du petit bonheur, Phonphonse, Musique, Neunoeil, Milo, nouveaux Pieds-Nickelés, traversent les noires années de guerre armés de cet esprit de drÎlerie qui en fera des héros malgré eux. Voici le vol de la bicyclette d'un feldgendarme, larcin bien encombrant. Voici de méchantes explications nocturnes dans la rue, avec des copains passés de l'autre cÎté. Voici aussi le coup de projecteur inattendu sur l'enfance abandonnée du petit garçon, confié pendant trois ans à des fermiers du Loiret; plus tard la silhouette merveilleuse de la grand-mÚre à qui il voue une fiÚre gratitude. Voici les roueries du marché noir, les grandes vacances au maquis et la libération de Paris vécue rue Saint-André-des-Arts et place Saint-Michel, et racontées en évitant d'enfler le ton.

«Ça faisait maintenant six mois que j'Ă©tais branchĂ© avec la RĂ©sistance. Le grand moment de ma vie, je me figurais. Jusque-lĂ , ça s'Ă©tait poursuivi cahin nos salades de terrain vague, nos conciliabules, nos propos en l'air. On parlait de rejoindre les Anglais, ça nous semblait le remĂšde de tous nos maux... la vie trop monotone, les restrictions, la dĂ©pendance des adultes, la chtourbe ! Tout nous paraissait beau une fois pris le large. J'essaie aujourd'hui de me revoir exact... maigre, boutonneux, va de la gueule... me comprendre. Si je vire le schĂ©ma de l'esbroufe, la lĂ©gende qu'on entretient... j'aperçois, je perçois un zĂšbre difficile Ă  saisir. Il m'emmerde plutĂŽt de mon point de vue actuel. Il dit n'importe quoi... il se fait piĂ©ger... il risque de mourir pour rien du tout. La vie c'est pourtant sa seule richesse... les plaisirs Ă  prendre, le bon air qu'on respire le jour oĂč l'on sort d'une prison, d'un hĂŽpital... le coup qu'on va boire quand il fait soif... la femme qui se dĂ©loque, qui s'offre... les courts instants de bonheur qui vous rĂ©concilient avec l'existence toujours ! C'eĂ»t Ă©tĂ© vraiment trop bĂȘte, trop abominable de se faire Ă©tendre pour le droit d'ĂȘtre sur le monument aux morts, pour la gloire du GĂ©nĂ©ral, pour des lendemains qui doivent chanter et qui finissent par pleurer des larmes de sang.» Alphonse Boudard.

Alphonse Boudard est une légende de la littérature française d'aprÚs guerre aux cÎtés de René Fallet, Albert Simonin ou encore Antoine Blondin. Né à Paris en 1925, de pÚre inconnu et de mÚre trop connue, il est élevé dans le 13e arrondissement prolétaire. Résistant de la premiÚre heure, il reçoit la médaille militaire. Mais aprÚs la guerre, il vit de petits boulots et traficote. Il glisse doucement mais sûrement vers la pÚgre. Plusieurs séjours en prison et sanatorium lui inspireront La Cerise et L'HÎpital. A 33 ans, il se consacre à l'écriture. Sa langue est verte, nourrie de l'argot et du langage populaire. Ses romans sont largement autobiographiques. Au cinéma, il collabore avec Michel Audiard, puis écrira pour Jean Gabin.