« Un monarque est terrible quand il est vaincu en magnanimité ».
Chateaubriand, avec tout son talent si brillant et fluide, tisse ce roman imbriquant amour, Histoire et religions ou croyances.
« Les Martyrs » est une épopée en prose et une œuvre apologétique publiée en 1809. Cet ouvrage est présenté en 24 Livres par l’auteur.
Paul Bénichou a expliqué que pour Chateaubriand ce qu’il s’agit de démontrer, c’est une parenté de nature entre deux moments historiques que les siècles séparent: en l'occurrence, il s'agit d'appréhender le nouvel ordre social après la Révolution de 1789 à la lumière d'un christianisme conciliant la liberté des individus héritée de l'Antiquité et les vertus sociales de la religion chrétienne.
Eudore, dernier descendant de Philipoemen, héros de la liberté grecque, est un soldat de l'Empire romain sous Dioclétien. Il est né dans une famille chrétienne et vient d'Arcadie.
Les douze premiers livres des Martyrs mettent en scène Eudore faisant le récit des premières années de sa vie jusqu'au moment de son retour en Arcadie. Il s'adresse à Cyrille, évêque de Lacédémone, Démodocus et Cymodocée, descendants d'Homère, et à sa famille.
Le récit d'Eudore met en scène un long voyage, dont les principales étapes sont Rome, les pays barbares du nord, l'Armorique, le désert d'Égypte et la Terre sainte.
Les douze derniers livres des Martyrs exposent le triomphe de la religion chrétienne sous la persécution de Dioclétien. Cymodocée et Eudore meurent dans le cirque de Rome, après quoi l'armée de Constantin, premier empereur converti au christianisme, chasse le tyran et établit un nouvel ordre dans la cité éternelle. » Wikipedia.
Madame la baronne de Carlowitz évoque « Les Martyrs », dans sa belle Notice introductive de « La Messiade », de Friedrich Gootlieb Klopstock traduite superbement par elle.
(Sur notre site).
Quelques extraits des Martyrs :
« Bethléem était entièrement désert : les chrétiens avaient été dispersés. Cymodocée et son guide entrent dans la Crèche : ils admirent cette grotte où le Roi des cieux voulut naître, où les anges, les bergers et les mages le vinrent adorer, où toute la terre doit un jour apporter ses hommages. »
« Nourrie dans les riantes idées de la mythologie, environnée jusqu'alors des images les plus douces et les plus gracieuses, Cymodocée avait à peine connu le nom de la tristesse et de l'adversité. Elle n'avait point été formée à cette école chrétienne où, dès le berceau, l'homme apprend qu'il est né pour souffrir. Depuis quelque temps, soumise aux épreuves de la Providence, la fille d'Homère avait changé de religion en changeant de fortune, et le christianisme était venu lui donner contre les afflictions de la vie des secours que ne lui offrait point le culte des faux dieux. Elle étudiait avec ardeur les livres saints... »
Prière de Cymodocée :
« Dieu inconnu, qui pénètres le fond de mon coeur ; Dieu qui as vu mourir ton Fils unique, si mes desseins te sont agréables, fais descendre sur mon père un de ces esprits qu'on appelle tes anges : ferme ses yeux appesantis par les larmes, et souviens-toi de lui quand je l'aurai quitté pour toi. »
Elle dit, et sa prière, sur des ailes de flamme, s'envole au sein de l'Éternel. L'Éternel la reçoit dans sa miséricorde, et l'ange du sommeil abandonne aussitôt les voûtes éthérées, il vole à la retraite solitaire de Démodocus. Ce père infortuné s'agitait, brûlant sur sa couche; le messager divin étend son sceptre pacifique et touche les paupières du vieillard : Démodocus tombe à l'instant dans un repos profond et délicieux: Il n'avait connu jusqu'alors que ce sommeil frère de la mort, habitant des enfers, enfant de ces démons appelés dieux parmi les hommes ; il ignorait ce sommeil de vie qui vient du ciel ; charme puissant composé de paix et d'innocence, qui n'amène point de songes, qui n'appesantit point l'âme et qui semble être une douce vapeur de la vertu. L'ange du repos n'ose approcher de Cymodocée : il s'incline avec respect devant cette vierge qui prie, et, la laissant sur la terre, il va l'attendre dans le ciel. »
Faisons maintenant connaissance avec Eudore et Cymodocée...
Illustration : Peinture en grisé pour l'illustration des Martyrs : Eudore reconduit Cymodocée chez son père Demodocus, Livre 01.
Source: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56076406/f173.item.r=chateaubriand+martyrs.langFR