"La Femme de trente ans n’est pas un “roman balzacien” traditionnel. Son premier titre Même histoire correspondrait mieux au dessein de Balzac de mettre en scène, sous des scénarios variés, un drame identique toujours recommencé : celui de la femme mariée au début du XIXe siècle. Voilà ce qui explique l’étrange composition de cette œuvre construite comme une mosaïque à partir de six nouvelles différentes qui seront progressivement réunies comme les différents chapitres d’un roman.
Cette “même histoire” est celle de la déception et du profond désenchantement d’une jeune femme mal mariée et privée du droit à l’émancipation et au plaisir. Balzac savait de quoi il parlait puisque sa plus jeune sœur, Laurence, mourut à 23 ans dans la misère et le chagrin après un mariage en apparence brillant et honorable avec un certain M. de Montzaigle (le modèle de l’odieux d’Aiglemont du roman).
Julie, l’héroïne de cette histoire, s’aperçoit qu’à trente ans la femme – qui atteint sa “sommité poétique” – peut encore avoir “d’irrésistibles attraits pour un jeune homme”. Cependant, une fois “mariée, elle ne s’appartient plus, elle est la reine et l’esclave du foyer domestique”. Julie connaîtra néanmoins l’amour dont elle rêvait, mais elle apprendra aussi que toute passion interdite aux yeux du monde et de la morale se paie de souffrances infinies."
Claude Colombini Frémeaux