Pierre Bouchardon (1870-1950)
"C’était pendant l’Exposition de1889.
Le vendredi 26 juillet, M. Toussaint-Augustin Gouffé, titulaire d’une des importantes charges d’huissier de Paris, quitta son étude, 148 rue Montmartre, vers six heures et demie du soir. Il avait terminé ses affaires.
Il n’alla pas loin.
13 boulevard Montmartre, il s’attabla à la terrasse du café Véron, avec trois consommateurs qui s’y trouvaient déjà : Henri-Ernest Letestu, marchand d’objets de curiosité, Georges Dacosta, publiciste financier, et Paul-Pierre Martinet. Celui-ci, plus connu comme anarchiste que comme homme de lettres, s’était attiré, il n’y avait pas si longtemps, pour avoir pris part à une manifestation, place de l’Opéra, certains ennuis judiciaires.
Bien que le connaissant à peine, Me Gouffé s’amusa à l’entendre développer ses théories subversives, et, comme il était, ce soir-là, de joyeuse humeur, il lui donna la réplique.
Au bout d’un moment, Letestu tira sa montre et fit cette remarque : « Il est déjà sept heures dix. Ce n’est pas que je m’ennuie avec vous, mais je ne peux rester davantage. Vous venez, Dacosta ? » À ces mots, les quatre amis de rencontre levèrent le camp. Martinet demeura une minute encore, le temps d’achever sa consommation, et prit ensuite le chemin de la rue Réaumur. Les trois autres firent ensemble quelques pas sur le boulevard, mais, à l’angle de la rue Vivienne, Letestu et Dacosta arrêtèrent un fiacre, qui les conduisit à l’Exposition, où les attendait la femme du premier.
Me Gouffé demeura seul."
Documentaire.
Fin juillet 1890, Me Gouffé, notaire à Paris, est assassiné... Cette affaire alimentera, pendant plus d'un an, les journaux. Une affaire à rebondissements.... Une affaire où la réalité dépasse la fiction...