Théophile Gautier (1811-1872)
"Tu te plains, mon cher ami, de la rareté de mes lettres. – Que veux-tu que je t’écrive, sinon que je me porte bien et que j’ai toujours la même affection pour toi ? – Ce sont choses que tu sais parfaitement, et qui sont si naturelles à l’âge que j’ai et avec les belles qualités qu’on te voit, qu’il y a presque du ridicule à faire parcourir cent lieues à une misérable feuille de papier pour ne rien dire de plus. – J’ai beau chercher, je n’ai rien qui vaille la peine d’être rapporté ; – ma vie est la plus unie du monde, et rien n’en vient couper la monotonie. Aujourd’hui amène demain comme hier avait amené aujourd’hui ; et, sans avoir la fatuité d’être prophète, je puis prédire hardiment le matin ce qui m’arrivera le soir.
Voici la disposition de ma journée : – je me lève, cela va sans dire, et c’est le commencement de toute journée ; je déjeune, je fais des armes, je sors, je rentre, je dîne, fais quelques visites ou m’occupe de quelque lecture : puis je me couche précisément comme j’avais fait la veille ; je m’endors, et mon imagination, n’étant pas excitée par des objets nouveaux, ne me fournit que des songes usés et rebattus, aussi monotones que ma vie réelle : cela n’est pas fort récréatif, comme tu vois. Cependant je m’accommode mieux de cette existence que je n’aurais fait il y a six mois. – Je m’ennuie, il est vrai, mais d’une manière tranquille et résignée, qui ne manque pas d’une certaine douceur que je comparerais assez volontiers à ces jours d’automne pâles et tièdes auxquels on trouve un charme secret après les ardeurs excessives de l’été."
Le chevalier d'Albert est à la recherche de la femme idéale. Sa quête de la beauté parfaite l'attire, malgré lui, vers Théodore de Sérannes, un jeune homme séduisant qui répond à tous les critères de beauté et de pureté recherchés par le chevalier. Qui est vraiment Théodore ?
Roman épistolaire.