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Marcelin

Livre numérique


Marcelin a enfoui dans sa mémoire un lourd secret jusqu’à l’oublier. Mais le destin peut disposer parfois d’un révélateur cruel...

TOUT LE MONDE n’a pas la chance d’être né fils de riches quincailliers-bazar disparus en mer aux abords de Venise lors d’une croisière à six cent cinquante euros la semaine.

À dix-huit ans et un jour, Marcelin l’eut.

*

Son portrait :

Grand, fin, sec, paire de lunettes mutualiste, front bas coupé en deux par une fine ride horizontale. Bouche assortie. Lèvres aussi minces que les queues des cerises. Et un nez.

Le nez ?... Surplombant un buisson d’épineux, un bout de chair déjà vieux avec des trous pour respirer. Comme le hasard ne fait rien à la légère, Marcelin naquit sourd d’une oreille, la gauche, et radin comme pas deux !

Si l’estime était un vent, beaucoup de mes amis auraient les cheveux ébouriffés. Ceux de Marcelin, pareils à une fiente tombée du ciel, humide et argileuse, sur la peau de son crâne bosselé semblaient s’être figés depuis toujours.

Sa vie (ce que nous en savions) :

Enfance solitaire. Deuil des parents.

Vente du commerce familial.

Acquisition de l’ancienne maison du docteur Fretin décédé, Villa Verlaine.

Achat d’un costume. Quarante années.

Cent soixante saisons. Quatorze mille six cents jours... et autant de demi-baguettes trempées dans du chocolat.

Sa mort :

Prématurée.

Rien ne vient jamais combler l’absence d’amour de ses géniteurs. La solitude en est le prix surtout lorsque la mémoire met le boisseau sur d’infames souvenirs. Mais le destin est en embuscade dans toute sa noirceur. La naissance de Marcelin est anthologique. Cazenave nous invite à pénétrer un univers constitué de personnages déglingués pour lesquels on ne peut se dispenser d’avoir pour eux une grande tendresse, finalement.