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Botticelli

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Sandro Botticelli (Alessandro di Mariano Filipepi) (Florence, 1445 – 1510)

Botticelli Ă©tait le fils d'un citoyen jouissant d'une situation confortable, et avait Ă©tĂ© «instruit dans toutes les choses que les enfants doivent habituellement savoir avant de choisir une vocation ». Mais il refusa de consacrer son attention Ă  la lecture, l'Ă©criture et le calcul, poursuit Vasari, de sorte que son pĂšre, dĂ©sespĂ©rant de le voir un jour Ă  l'Ă©cole, le plaça en apprentissage auprĂšs de l'orfĂšvre Botticello, d'oĂč le nom qui est passĂ© Ă  la postĂ©ritĂ©. Mais Sandro, jeune garçon Ă  l'air entĂȘtĂ©, dotĂ© de grands yeux calmes et scrutateurs et d'une tignasse blonde – il s'est reprĂ©sentĂ© lui-mĂȘme sur le cĂŽtĂ© gauche de L'Adoration des Mages – voulait bien devenir peintre, et il fut donc placĂ© auprĂšs du moine carmĂ©lite Fra Filippo Lippi.

Comme de nombreux artistes de son temps, satisfait de la joie que lui procurait la peinture, il se tourna vers l'Ă©tude de la beautĂ© et du caractĂšre de l'homme, plutĂŽt que vers les thĂšmes religieux. Ainsi, Sandro fit des progrĂšs rapides, aimant son professeur et, plus tard, le fils de celui-ci, Filippino Lippi, auquel il apprit Ă  peindre. Mais le rĂ©alisme du maĂźtre le toucha Ă  peine, car Sandro Ă©tait un rĂȘveur et un poĂšte.

Botticelli n'est pas un peintre de faits, mais d'idĂ©es ; ses tableaux ne sont pas tant des reprĂ©sentations d'objets que des agencements de motifs et de formes. Ses couleurs ne sont pas riches et proches de la vie, mais subordonnĂ©es Ă  la forme, et elles sont souvent des nuances plus que de vraies couleurs. En rĂ©alitĂ©, il s'intĂ©resse aux possibilitĂ©s abstraites de son art, et ses personnages n'occupent pas de place bien dĂ©finie dans l'espace : ils n'attirent pas notre oeil par leur volume, mais suggĂšrent plutĂŽt un motif ornemental plat. De mĂȘme, les lignes qui entourent les personnages sont choisies pour leur fonction premiĂšre, dĂ©corative.

On a dit que Botticelli, «bien qu'Ă©tant un piĂštre anatomiste, Ă©tait l'un des plus grands dessinateurs de la Renaissance ». Comme exemple d'anatomie erronĂ©e, nous pouvons citer la maniĂšre improbable dont la tĂȘte de la Madone est reliĂ©e Ă  son cou, ou encore toutes les articulations approximatives et les membres difformes que l'on trouve dans les tableaux de Botticelli. Pourtant, son talent de dessinateur fut reconnu, car il donna Ă  la «ligne » non seulement une beautĂ© intrinsĂšque, mais Ă©galement un sens. Autrement dit, en langage mathĂ©matique, il rĂ©duisit le mouvement de la figure Ă  la somme de ses facteurs Ă©lĂ©mentaires, Ă  ses plus simples formes d'expression. Il combina ensuite ces diverses formes

en une figure qui, Ă  travers ses lignes rythmiques et harmoniques, projette sur notre imagination les sentiments poĂ©tiques qui animaient l'artiste lui-mĂȘme. Ce pouvoir de faire compter chaque ligne, Ă  la fois par son sens et par sa beautĂ©, distingue les grands maĂźtres du dessin de la grande majoritĂ© des artistes, utilisant la ligne avant tout comme un outil nĂ©cessaire Ă  la reprĂ©sentation des objets concrets.