Découvrez un nouveau numéro en version numérique de la revue littéraire belge Marginales
Tolstoï passant la nuit dans le poste de police où a été recueillie la femme adultère qui, de désespoir, s'est jetée sous un train. Cette contemplation morbide va être à la source de son Anna Karénine. Stendhal se passionnant pour le crime passionnel de ce jeune homme qui a assassiné en pleine église la mère des enfants dont il avait été le précepteur. Passé par le prisme de son imagination, ce meurtre fournira la matière du Rouge et le Noir. Flaubert, lassé de s'être confronté aux rigueurs de la fiction historique, est encouragé par ses amis à se focaliser sur le suicide d'une épouse de médecin de campagne. Madame Bovary va en résulter. Trois des plus importants romans jamais écrits sont des décoctions de faits divers. Cela mérite réflexion.
Qu'est-ce, d'abord, qu'un fait divers ? Karine Lanini, dans le Dictionnaire du littéraire (PUF, 2002), en donne une définition qui est opératoire : "Le fait divers, écrit-elle, est un événement quotidien distingué parmi d'autres événements anonymes, que la presse décide de rapporter en raison de son caractère frappant." Et, de fait, les "modèles" de Tolstoï, de Stendhal, de Flaubert étaient ce qu'on appelle des anonymes, au sens où ils ne se sont distingués que par le fait marquant dont ils ont été les protagonistes. Ce sont des gens très ordinaires qui, brusquement, défrayent la chronique, et qui rappellent qu'il n'y a pas de gens "ordinaires", que chacun est une exception, éminemment singulière, et en ce sens porteuse d'un mystère qui lui est propre, qui est irréductible à tout autre.
Des poèmes et nouvelles inspirés par la thématique des faits divers avec des écrivains comme Françoise Lalande, Laurent Demoulin ou encore Jean-Luc Wart.
À PROPOS DE LA REVUE
Marginales est une revue belge fondée en 1945 par Albert Ayguesparse, un grand de la littérature belge, poète du réalisme social, romancier (citons notamment Simon-la-Bonté paru en 1965 chez Calmann-Lévy), écrivain engagé entre les deux guerres (proche notamment de Charles Plisnier), fondateur du Front de littérature de gauche (1934-1935). Comment douter, avec un tel fondateur, que Marginales se soit dès l’origine affirmé comme la voix de la littérature belge dans le concert social, la parole d’un esprit collectif qui est le fondement de toute revue littéraire, et particulièrement celle-ci, ce qui l’a conduite à s’ouvrir à des courants très divers et à donner aux auteurs belges la tribune qui leur manquait.
Marginales, c’est d’abord 229 numéros jusqu’à son arrêt en 1991. C’est ensuite sept ans d’interruption et puis la renaissance en 1998 avec le n°230, sorti en pleine affaire Dutroux, dont l’évasion manquée avait bouleversé la Belgique et fourni son premier thème à la revue nouvelle formule. Marginales reprit ainsi son chemin par une publication régulière de 4 numéros par an.
LES AUTEURS
Jacques De Decker, Pierre Mertens, André Sempoux, Alain Delaunois, Dominique Costermans, Jean-Marie Piemme, Jean-Luc Wart, Michel Lambert, Éva Kavian, Jean-Baptiste Baronian, Françoise Nice, Laurent Demoulin, Yves Wellens, Kenan Görgün, Françoise Lalande, Philippe Jones, Corinne Hoex, Jacqueline De Clercq, Liliane Schraûwen, Ludovic Flamant, Monique Thomassettie, Otto Ganz, Jack Keguenne, Luc Dellisse et Claude Javeau.