Une jeune femme recouvre sa propre existence avec les lambeaux de la vie d'une autre, et tout bascule...
Fragments est l’histoire d’une contagion passionnelle par le biais de la lecture, sur fonds de lutte contre le nucléaire.
Dora, une femme blessée par la vie, dépressive, se retire loin de tout pour écrire dans l’espoir de guérir ; des pages et des pages, tous les jours. A les piller clandestinement, Millie, une employée ordinaire, ne pourra s’imprégner que de quelques bribes, de fragments d’une passion étrangère ; et cette lecture précipitée va devenir une nécessité dans le vide de sa vie. Millie va en arriver à recouvrir sa propre existence avec les lambeaux de la vie d’une autre, et tout va basculer.
« …A lire ces bribes chargées de passion, Millie s’est enflammée, se sentant dès lors source d’une force inconnue ; un amour sans cible, sans branche où se poser(…) Pour qui cet élan fabuleux qui la submerge ?( …) Est-il possible d’aimer passionnément… personne ? Ou est-ce seulement le germe d’une grosse mélancolie ? » « ― Vous savez, je n’ai jamais écrit que des articles, des reportages. Quelle que soit la passion qu’on éprouve pour une forme artistique, on ne s’improvise pas sculpteur, ou peintre ou… écrivain… Écrire à ce niveau-là représente une telle entreprise, une telle maîtrise, de la langue, bien sûr ; mais surtout de la composition, du temps… Je n’en serais sûrement pas capable, bien que j’y aie souvent songé. Cet univers me fascine, c’est vrai, mais lorsqu’on se met à écrire, on se rend compte, si on est lucide, qu’on se met très vite à dire des choses insignifiantes… Les choses importantes, pleines, se retrouvent noyées dans une logorrhée qui ne sert peut-être qu’à cacher une vacuité de la pensée. »
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EXTRAIT
Quelques feuilles de papier jonchent le tapis devant la table de chevet, dont les pliures montrent qu’elles ont été piétinées plusieurs fois.
Dora regarde sans les voir ses mains nerveuses et sèches ; elle a retiré les divers anneaux d’argent qui ornaient ses doigts, et ce déshabillage leur confère une sorte de légèreté à laquelle il faudra s’habituer ; près d’elle, sur le lit, des dépliants à en-tête d’hôtels divers et de maisons de convalescence.
Un sac de voyage à moitié rempli bâille près de la porte d’entrée. Le taxi au bas de l’immeuble s’est signalé par trois coups de klaxon brefs, comme convenu au téléphone. En fait, quitter cet appartement niché au bas de la Butte Montmartre s’avère plus facile que prévu : elle n’a fait le plus souvent qu’y passer rapidement.