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Gustave Courbet

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Gustave Courbet (Ornans, 1819 – La Tour de Peilz, Suisse, 1877)

Ornans, sa ville natale, se situe prÚs la ravissante vallée du Doubs, et c'est là que jeune garçon, et plus tard en tant qu'homme, il acquit l'amour du paysage. Il était par nature révolutionnaire, un homme né pour s'opposer à l'ordre existant et affirmer son indépendance ; il possédait la rage et la brutalité qui font le poids d'un révolutionnaire en art comme en politique. Et son esprit de révolte se manifesta dans ces deux directions.

Il s'installa Ă  Paris pour Ă©tudier l'art. Toutefois, il ne se fixa pas Ă  l'atelier d'un maĂźtre influent en particulier. Dans sa province natale dĂ©jĂ , il n'avait pas cherchĂ© Ă  se former Ă  la peinture, et prĂ©fĂ©rait maintenant Ă©tudier les chefsd'oeuvre exposĂ©s au Louvre. Au dĂ©but, ses oeuvres n'Ă©taient pas assez caractĂ©ristiques pour susciter une quelconque opposition, et elles furent admises au Salon. Puis il produisit L'Enterrement Ă  Ornans, qui fut violemment pris d'assaut par les ritiques : «Une mascarade de funĂ©railles, six mĂštres de long, dans lesquels il y a plus motif Ă  rire qu'Ă  pleurer ». En rĂ©alitĂ©, la vĂ©ritable offense des tableaux de Courbet Ă©tait de reprĂ©senter la chair et le sang vivants ; des hommes et des femmes tels qu'ils sont vraiment, et faisant vraiment ce qu'ils sont occupĂ©s Ă  faire – non pas des hommes et des femmes dĂ©pourvus de personnalitĂ© et idĂ©alisĂ©s, peints dans des positions destinĂ©es Ă  dĂ©corer la toile. Il se dĂ©fendit en disant qu'il peignait les choses telles qu'elles sont, et professa que la vĂ©ritĂ© vraie devait ĂȘtre le but de l'artiste. C'est ainsi que lors de l'Exposition universelle de 1855, il retira ses tableaux du site officiel et les exposa dans une cabane en bois, juste Ă  cĂŽtĂ© de l'entrĂ©e, arborant l'intitulĂ© en majuscules : «Courbet – RĂ©aliste ».

Comme tout rĂ©volutionnaire, c'Ă©tait un extrĂ©miste. Il ignorait dĂ©libĂ©rĂ©ment le fait que chaque artiste possĂšde sa propre vision et sa propre expĂ©rience de la vĂ©ritĂ© de la nature ; et il choisit d'affirmer que l'art n'Ă©tait qu'un moyen de reprĂ©senter objectivement la nature, dĂ©nuĂ© d'intentions, et non une affaire de choix ou d'arrangement. Dans son mĂ©pris pour la beautĂ©, il choisit souvent des sujets que l'on peut sans mal qualifier de laids. Il possĂ©dait nĂ©anmoins un sens de la beautĂ© doublĂ© d'une aptitude aux profondes Ă©motions, qui transparaĂźt tout particuliĂšrement dans ses marines. Il se rĂ©vĂ©la ĂȘtre un peintre puissant, au geste ample et libre, utilisant des couleurs sombres en couche Ă©paisse, et dessinant ses contours avec une fermetĂ© qui rendait toutes ses reprĂ©sentations trĂšs rĂ©elles et mouvementĂ©es.