Jules Verne (1828-1905)
"Le 27 fĂ©vrier 1854, deux hommes, Ă©tendus au pied dâun gigantesque saule pleureur, causaient en observant avec une extrĂȘme attention les eaux du fleuve Orange. Ce fleuve, le Groote-river des Hollandais, le Gariep des Hottentots, peut rivaliser avec les trois grandes artĂšres africaines, le Nil, le Niger et le ZambĂšse. Comme elles, il a des crues, des rapides, des cataractes. Quelques voyageurs, dont les noms sont connus sur une partie de son cours, Thompson, Alexander, Burchell, ont tour Ă tour vantĂ© la limpiditĂ© de ses eaux et la beautĂ© de ses rives.
En cet endroit, lâOrange, se rapprochant des montagnes du duc dâYork, offrait aux regards un spectacle sublime. Rocs infranchissables, masses imposantes de pierres et de troncs dâarbres minĂ©ralisĂ©s sous lâaction du temps, cavernes profondes, forĂȘts impĂ©nĂ©trables que nâavait pas encore dĂ©florĂ©es la hache du settler, tout cet ensemble, encadrĂ© dans lâarriĂšre-plan des monts Gariepins, formait un site dâune incomparable magnificence. LĂ , les eaux du fleuve, encaissĂ©es dans un lit trop Ă©troit pour elles et auxquelles le sol venait Ă manquer subitement, se prĂ©cipitaient dâune hauteur de quatre cents pieds. En amont de la chute, câĂ©tait un simple bouillonnement des nappes liquides, dĂ©chirĂ©es çà et lĂ par quelques tĂȘtes de roc enguirlandĂ©es de branches vertes. En aval, le regard ne saisissait quâun sombre tourbillon dâeaux tumultueuses, que couronnait un Ă©pais nuage dâhumides vapeurs, zĂ©brĂ©es des sept couleurs du prisme. De cet abĂźme sâĂ©levait un fracas Ă©tourdissant, diversement accru par les Ă©chos de la vallĂ©e."
1854 : mesurer un arc de méridien en Afrique australe... c'est la mission qu'ont trois savants anglais et trois savants russes. Arriveront-ils à s'entendre ? Au cours de leurs aventures, ils apprennent que la guerre est déclarée entre leurs deux pays...