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La lampe ardente

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Delly (1875-1947) (1876-1949)

"En quelques traits rapides, Raymond acheva le dessin commencĂ©, puis il leva les yeux et regarda longuement la vue qu’il venait de reproduire.

Il se trouvait sur une terrasse rocheuse, entourĂ©e de pins et de bouleaux. Le regard plongeait dans la gorge au fond de laquelle bouillonnait, invisible, la torrentueuse petite riviĂšre ; en face, il rencontrait un roc Ă©norme, couleur de fumĂ©e, striĂ© de roux, dressĂ© entre les sapins et les hĂȘtres couvrant tout ce qui n’était pas la roche nue.

À la fin de ce gris aprĂšs-midi, un peu de lumiĂšre paraissait, diffusĂ©e par le soleil abaissĂ© Ă  l’horizon derriĂšre un long nuage couleur de perle. Cette clartĂ© lĂ©gĂšre touchait timidement le sommet du grand roc, caressait les arbustes qui se penchaient vers la fraĂźcheur humide de la riviĂšre, sur le versant de la gorge oĂč se voyait la petite terrasse aux balustres de sapin rouge fleuris de roses gĂ©raniums Ă  longues traĂźnes.

Dans cette solitude, le silence n’était troublĂ© que par le bouillonnement du torrent. Mais bientĂŽt, Raymond perçut un bruit de pas. En se dĂ©tournant, il vit une jeune fille s’avancer dans l’allĂ©e de pins qui montait jusqu’à la terrasse. L’ombre environnante faisait paraĂźtre plus claire la fine silhouette vĂȘtue d’une robe lĂ©gĂšre couleur de lavande, le teint dĂ©licat, les cheveux blonds. Les petits souliers de daim gris semblaient frĂŽler le sol couvert d’aiguilles de pins.

Raymond sourit, en demandant :

– Tu viens me chercher, Paule ?

– Mais non, mon ami. Six heures sonnent seulement. Je suis Ă  la recherche d’Ariane, qui doit se promener de ce cĂŽtĂ©."

Raymond et Paule s'aiment depuis toujours et doivent se marier. Mais Paule semble réticente depuis la venue au chùteau familiale de Ferdinand, avocat comme Raymond. Ferdinand est une célébrité du barreau, mais il est imbu de sa personne. Résultat : le mariage est compromis...