Louis Boussenard (1847-1910)
"â Ă moi !... sâĂ©cria dâune voix Ă©touffĂ©e le timonier sans lĂącher la barre, bien quâil eĂ»t le col furieusement Ă©treint par les deux griffes crochues dâun noir.
« à moi !... » hurla-t-il une seconde fois, les yeux blancs, la face violacée, la bouche tordue.
â Tiens bon... Pierre !... On y va !...
Et le timonier Pierre, dĂ©faillant, hors dâhaleine, aperçoit, comme dans un brouillard, un petit bonhomme sortant on ne sait dâoĂč, qui dâun bond sâĂ©lance vers lui.
Le canon dâun revolver frĂŽle son oreille. Le coup part.
LâĂ©treinte du noir se desserre aussitĂŽt. La tĂȘte grimaçante, que Pierre ne peut voir, Ă©clate, fracassĂ©e par la balle de onze millimĂštres. Le fĂ©roce ennemi qui sâĂ©tait hissĂ© par la chaĂźne du gouvernail dĂ©gringole dans le fleuve ; un crocodile le happe au passage, et lâentraĂźne Ă travers les herbes.
â Merci tout de mĂȘme, Friquet, dit Pierre en avalant une vaste lampĂ©e dâair.
â Y a pas dâquoi, va, mon vieux... Ă charge de revanche, pas vrai...
« A pas peur !... Y va faire chaud tout Ă lâheure. »
Friquet disait vrai.
Il faisait doublement et terriblement chaud, sur le pont de la jolie chaloupe Ă vapeur qui remontait en ce moment, Ă grand-peine, le cours de lâOgĂŽouĂ©."
Friquet, débrouillard comme tous les titis parisiens, décide de faire le tour du monde, aprÚs avoir lu le livre de Jules Verne : "Le tour du monde en 80 jours". Arrivé en Afrique, il fait la connaissance de ses futurs amis...