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Les Liaisons dangereuses

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Pierre Ambroise François Choderlos de Laclos (Amiens, 18 octobre 1741 - Tarente, Italie, 5 septembre 1803) est un écrivain et officier militaire français. Il est un cas unique dans la littérature française, et fut longtemps considéré comme un écrivain aussi scandaleux que le marquis de Sade ou Restif de la Bretonne.

Il Ă©tait un militaire sans illusions sur les relations humaines, et un Ă©crivain amateur, cependant son projet phare Ă©tait de « faire un ouvrage qui sortĂźt de la route ordinaire, qui fĂźt du bruit, et qui retentĂźt encore sur la terre quand j'y aurais passĂ© » ; de ce point de vue il a largement atteint son but, car la renommĂ©e de son livre maĂźtre Les Liaisons dangereuses est telle qu'il peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un des livres parmi les plus connus au monde.

C'est un des chefs-d'Ɠuvre de la littĂ©rature romanesque du XVIIIe siĂšcle, qui met en scĂšne les intrigues amoureuses de l'aristocratie. Il a inspirĂ© un trĂšs grand nombre de travaux critiques et analytiques, de piĂšces de thĂ©Ăątre et de films. Le roman a Ă©tĂ© plusieurs fois portĂ© au cinĂ©ma, par Roger Vadim, Stephen Frears ou Milos Forman.

Biographie

Pierre Ambroise Choderlos de Laclos est nĂ© Ă  Amiens, chef-lieu du dĂ©partement de la Somme, le 18 octobre 1741. Il est le deuxiĂšme fils d'un secrĂ©taire Ă  l'intendance de Picardie et d'Artois, de petite et rĂ©cente noblesse — une famille de robe rĂ©cemment anoblie.

La carriĂšre militaire

Être militaire est pour lui une vĂ©ritable vocation, et il choisit donc le mĂ©tier des armes bien que ses perspectives de promotion ne soient pas trĂšs grandes. Il choisit l'artillerie, qui est une arme technique convenant bien Ă  son esprit mathĂ©matique, et est admis en 1760 Ă  l'École de la FĂšre — ancĂȘtre de l'École polytechnique.

Il est nommĂ© successivement sous-lieutenant en 1761 puis lieutenant en second en 1762. RĂȘvant de conquĂȘtes et de gloire, il se fait affecter Ă  la Brigade des colonies, en garnison Ă  La Rochelle. Mais le traitĂ© de Paris en 1763, met fin Ă  la guerre de Sept Ans. Faute de guerre, le jeune lieutenant de Laclos est obligĂ© d'Ă©touffer ses ambitions guerriĂšres et de mener une morne vie de garnison : au 7e rĂ©giment d'artillerie de Toul en 1763, Ă  Strasbourg de 1765 Ă  1769, Ă  Grenoble de 1769 Ă  1775, puis Ă  Besançon de 1775 Ă  1776.

NommĂ© capitaine Ă  l'anciennetĂ© en 1771 — il le restera durant dix-sept ans jusqu'Ă  la veille de la RĂ©volution — cet artilleur, froid et logicien, Ă  l'esprit subtil, s'ennuie parmi ses soldats grossiers, et pour occuper son temps, il s'investit dans la littĂ©rature et dans l'Ă©criture. Ses premiĂšres piĂšces, Ă©crites en vers lĂ©gers, sont publiĂ©es dans « L'Almanach des Muses ». S'inspirant d'un roman de Mme Riccoboni, il Ă©crit un assez mauvais opĂ©ra-comique « Ernestine », le mulĂątre d'origine guadeloupĂ©enne Chevalier de Saint-Georges se chargeant de la partition. Cette Ɠuvre n'aura qu'une seule dĂ©sastreuse reprĂ©sentation, le 19 juillet 1777 devant la reine Marie-Antoinette.

Lors de cette mĂȘme annĂ©e 1777, il reçoit la mission d'installer une nouvelle Ă©cole d'artillerie Ă  Valence qui recevra notamment NapolĂ©on. De retour Ă  Besançon en 1778, il est promu capitaine en second de sapeurs. Durant ses nombreux temps libres en garnison, il rĂ©dige plusieurs Ɠuvres, dans lesquelles il apparaĂźt comme un fervent admirateur de Jean-Jacques Rousseau et de son roman La Nouvelle HĂ©loĂŻse, qu'il considĂšre comme « le plus beau des ouvrages produits sous le titre de roman ». En 1778, il commence l'Ă©criture des Liaisons dangereuses.

Les Liaisons dangereuses

En 1779, il est envoyé en mission dans l'ßle-d'Aix pour assister le Marquis de Montalembert dans la direction des constructions de fortifications contre les Britanniques. De fait, il passe beaucoup de temps à rédiger Les Liaisons dangereuses, et aussi une Epßtre à Madame de Montalembert. Promu en cette fin d'année capitaine de bombardier, il demande un congé de six mois qu'il occupe à Paris à écrire ; il sait que désormais son ambition littéraire doit passer avant son ambition militaire, pour laquelle il se sent frustré.

Son ouvrage en gestation contient ses frustrations militaires — n'avoir jamais pu faire valoir ses qualitĂ©s lors d'une guerre — mais aussi les nombreuses humiliations qu'il estime avoir subies toute sa vie, de la part des vrais aristocrates, ainsi que de femmes qu'il pense inaccessibles. Les Liaisons dangereuses sont donc aussi pour lui une sorte de vengeance et une thĂ©rapie par l'Ă©criture.

En 1781, promu capitaine-commandant de canonniers, il obtient une nouvelle permission de six mois, lors de laquelle il achĂšve son chef-d'Ɠuvre. Il confie Ă  l'Ă©diteur Durand Neveu la tĂąche de le publier en quatre volumes qui sont proposĂ©s Ă  la vente le 23 mars 1782. Le succĂšs est immĂ©diat et fulgurant ; la premiĂšre Ă©dition comprend deux mille exemplaires qui sont vendus en un mois — ce qui pour l'Ă©poque est dĂ©jĂ  assez extraordinaire — et dans les deux annĂ©es qui suivent une dizaine de rĂ©Ă©ditions sont aussi proposĂ©es et vendues.

Cependant la publication de cet ouvrage sulfureux, considéré comme une attaque contre l'aristocratie, est jugée comme une faute par son commandement. Ordre lui est donné de rejoindre immédiatement sa garnison en Bretagne, depuis laquelle il est envoyé à La Rochelle en 1783 pour participer à la construction du nouvel arsenal. C'est là qu'il fait la connaissance de Marie-Soulange Duperré, qu'il séduit et qui rapidement attend un enfant de lui. Il a 42 ans, elle seulement 24, mais, réellement amoureux, il l'épousera en 1786 et reconnaßtra l'enfant. Marie-Soulange sera le grand amour de sa vie et lui donnera deux autres enfants.

Choderlos de Laclos ne ressemble en rien au sĂ©ducteur archĂ©type du personnage de Valmont et n'en a aucunement les tares. Il n'est en rien un sĂ©ducteur, et on le dĂ©crit comme « un monsieur maigre et jaune » Ă  la « conversation froide et mĂ©thodique ». Exempte de conquĂȘtes, sa vie sentimentale se limite Ă  son Ă©pouse Marie-Soulange pour laquelle il est un Ă©poux fidĂšle, de mĂȘme qu'il est pour ses enfants un pĂšre attentionnĂ©.

Par la suite, il participe à un concours académique dont le sujet est « Quels seraient les meilleurs moyens de perfectionner l'éducation des femmes ? », ce qui lui permet de développer des vues plutÎt féministes sur l'égalité des sexes et l'éducation donnée aux jeunes filles. Dans ce texte resté inachevé, il dénonce l'éducation donnée aux jeunes filles qui ne vise alors, selon lui, « qu'à les accoutumer à la servitude, et à les y maintenir ». Le thÚme de l'émancipation féminine avait déjà dans Les Liaisons dangereuses un rÎle important.

Le 17 juin 1787 il écrivait au Journal de Paris son projet de numérotage des rues de Paris.

Le roman Ă©pistolaire de Choderlos de Laclos les Liaisons dangereuses retrace les aventures amoureuses de la Marquise de Merteuil et de son ancien amant, le Vicomte de Valmont. La Marquise, voulant se venger d'un amant infidĂšle alors promis Ă  la fille d'une cousine, CĂ©cile de Volanges, fait en sorte que le Vicomte dĂ©shonore cette derniĂšre avant le mariage. Ce que le Vicomte refuse, s'Ă©tant Ă©pris d'une femme reconnue pour sa vertu : la PrĂ©sidente de Tourvel. Elle tente de rester fidĂšle Ă  son mari mais le Vicomte parvient Ă  la piĂšger et Ă  la faire mourir d'amour. CĂ©cile de Volanges, quant Ă  elle, tombe amoureuse du chevalier Danceny, son maĂźtre de solfĂšge. Mais, la Marquise de Merteuil en fait son amant par toutes sortes de manoeuvres. Elle provoque ainsi un duel entre le Vicomte de Valmont, qui cherche Ă  retrouver ses faveurs, et le jeune chevalier Danceny, qui parviendra Ă  tuer le Vicomte, tourmentĂ© des regrets d'avoir condamnĂ© la PrĂ©sidente de Tourvel. Il remet alors au chevalier toute la correspondance qu'il a tenue avec la Marquise afin que celle-ci soit rĂ©vĂ©lĂ©e non comme la femme la plus vertueuse de Paris mais comme un dĂ©mon dangereux. Ce roman dĂ©nonce le concept de la femme-objet qui sort du couvent pour se marier et ĂȘtre une bonne Ă©pouse, c'est Ă  dire, savoir se taire en toutes circonstances.

La RĂ©volution

En 1788, il quitte l'armée. AprÚs une période de recherche personnelle du meilleur moyen de favoriser son ambition, et diverses tentatives pour approcher un grand seigneur, il entre au service du duc d'Orléans dont il partage les idées sur l'évolution de la royauté.

La Révolution qui éclate est enfin pour lui l'occasion de vivre intensément. DÚs le début il mÚne des intrigues en faveur de son maßtre et organise complots et machinations. Les 5 et 6 octobre 1789, il travaille aux journées versaillaises et rédige avec Brissot la pétition à l'origine de la fusillade du Champ-de-Mars. Le 17 juillet 1791, il négocie le rachat des six cents piques du 14 juillet.

Il se rallie Ă  l'idĂ©e rĂ©publicaine et quitte le duc d'OrlĂ©ans pour un poste de commissaire au ministĂšre de la Guerre oĂč il a la charge de rĂ©organiser les troupes de la jeune RĂ©publique. Ce poste de commissaire du ministĂšre est l'Ă©quivalent du grade de gĂ©nĂ©ral de brigade. GrĂące Ă  ses activitĂ©s, il prĂ©pare de façon dĂ©cisive Ă  la victoire lors de la bataille de Valmy. AprĂšs la trahison de Dumouriez, Robespierre le fait emprisonner comme orlĂ©aniste, mais il est libĂ©rĂ© lors de Thermidor.

Il met alors au point, lors d'expĂ©riences balistiques, un « boulet creux » chargĂ© de poudre. Choderlos de Laclos est donc l'inventeur de l'obus. En 1795, espĂ©rant ĂȘtre rĂ©intĂ©grĂȘ dans l'armĂ©e, il rĂ©dige un mĂ©moire intitulĂ© « De la guerre et de la paix » qu'il adresse au ComitĂ© de salut public, mais sans effet immĂ©diat. Il tente aussi d'entrer dans la diplomatie et de fonder une banque mais sans plus de succĂšs.

Finalement, il fait la connaissance du jeune gĂ©nĂ©ral NapolĂ©on Bonaparte, le nouveau Premier Consul, artilleur comme lui, et se rallie aux idĂ©es bonapartistes. Le 16 janvier 1800, il est rĂ©intĂ©grĂ© comme gĂ©nĂ©ral de brigade d'artillerie et affectĂ© Ă  l'ArmĂ©e du Rhin, oĂč il reçoit le baptĂȘme du feu Ă  la bataille de Bilberach. AffectĂ© au commandement de la rĂ©serve d'artillerie de l'ArmĂ©e d'Italie, il meurt le 5 septembre 1803 Ă  Tarente, non pas lors d'une bataille, mais affaibli par la dysenterie et la malaria. Il est enterrĂ© sur place. (Au retour des Bourbons en 1815, sa tombe fut violĂ©e et dĂ©truite.)

fr.wikipedia.org (10-08-2007)