Dans cette chronique dâun petit port breton du TrĂ©gor, au dĂ©but du XXe siĂšcle, Charles Le Goffic entend dĂ©noncer les mĂ©faits du rĂ©gime politique qui sĂ©vit alors. Câest lâĂ©poque du rĂ©publicanisme anticlĂ©rical du cabinet Combes, de la sĂ©paration de lâEglise et de lâEtat.
Les Ruguellou, marchands de vin en gros, « trustent », profitant dâune loi sur le libre commerce des liquides, la plupart des auberges de leur commune dont ils alcoolisent les administrĂ©s pour mieux les exploiter quand ils ne les spolient pas : qui tient les auberges tient le peuple »... M. Ruguellou, maire de sa commune, victime de lâaviditĂ© et de la cupiditĂ© de sa femme qui a pris les rennes du mĂ©nage et de la commune, est plus Ă plaindre quâĂ blĂąmer, mais les opposants, de leur cĂŽtĂ©, ne brillent guĂšre par leur intĂ©gritĂ© ! Un brillant roman noir !
Lâouvrage fut publiĂ©, initialement, en 1927. Lâauteur ne se faisait dâailleurs pas trop dâillusions ; sa confidence Ă son collaborateur Aug. Dupouy en est la preuve : « Je crois que Madame Ruguellou nâaura pas bonne presse et, mĂȘme, probablement, quâelle nâaura pas de presse du tout. Elle ne peut satisfaire aucun des camps politiques ». « Il a Ă©crit sur les premiĂšres annĂ©es de ce siĂšcle des pages dâhistoire dĂ©finitives. Il a Ă©tĂ© vrai. Mais Ă qui la faute si la vĂ©ritĂ© a un air de satire implacable ? », dira pourtant un critique de lâĂ©poque. Un grand roman Ă redĂ©couvrir en ce 150e anniversaire de la naissance de Charles Le Goffic.
Connu et reconnu pour ces recueils de contes traditionnels et de romans régionalistes, Charles Le Goffic (1863-1932) a su prouver un incomparable talent de « metteur en scÚne » de la Bretagne éternelle.