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Burne-Jones

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Edward Coley Burne–Jones (Birmingham, 1833 – Londres, 1898). Toute l'oeuvre de Burne-Jones peut ĂȘtre comprise comme une tentative de crĂ©er par la peinture un monde de beautĂ© parfaite, aussi diffĂ©rent du Birmingham de son enfance que possible, un conglomĂ©rat industriel, mugissant, d'une laideur et d'une misĂšre inimaginables. Les deux grands peintres symbolistes français, Gustave Moreau et Pierre Puvis de Chavannes, reconnurent immĂ©diatement Burne-Jones comme l'un de leurs compagnons de route artistique. Mais il est trĂšs invraisemblable que Burne-Jones ait acceptĂ© ou peut-ĂȘtre mĂȘme compris l'Ă©tiquette de «symboliste ». Pourtant, il semble avoir Ă©tĂ© l'un des membres les plus reprĂ©sentatifs du mouvement symboliste et de cet esprit «fin de siĂšcle » si largement rĂ©pandu.

Burne-Jones est généralement catalogué comme préraphaélite. En réalité, il ne fut jamais membre de la confrérie formée en 1848. La branche du préraphaélisme dont relÚve Burne-Jones n'est pas celle d'un Hunt ou d'un Millais mais de Dante Gabriel Rossetti. Le travail de Burne-Jones de la fin des années 1850 est d'ailleurs trÚs proche du style de Rossetti. Son idéal féminin est également inspiré de celui de Rossetti, caractérisé par des chevelures abondantes, des mentons affirmés, des cous longs et des corps androgynes cachés par d'amples robes médiévales. Les mentons affirmés demeurent un trait frappant que les deux artistes utilisÚrent dans leurs tableaux de femmes. A partir des années 1860, leurs canons de beauté

divergent. Celles de Burne-Jones se font de plus en plus virginales et éthérées, au point que dans certaines de ses oeuvres ultimes les jeunes femmes ont l'air anorexique. Au début des années 1870, Burne-Jones a peint de nombreux tableaux illustrant des mythes ou des légendes dans lesquels il semble avoir tenté d'exorciser le traumatisme de son histoire avec Mary Zambaco. De Constable à Francis Bacon, aucun peintre anglais vivant ne jouit d'une reconnaissance internationale aussi importante que celle dont Burne-Jones fit l'objet au début des années 1890. Sa grande réputation commença à décliner dÚs la seconde moitié de la décennie et s'effondra aprÚs 1900 avec le triomphe du Modernisme. A posteriori, nous pouvons interpréter cette absence de relief et ce détournement de la narration comme les caractéristiques d'un modernisme précoce, les premiers pas hésitants vers l'abstraction. Il n'est donc pas étrange que Kandinsky mentionne Rossetti et Burne-Jones comme les précurseurs de l'abstraction dans son livre Du spirituel dans l'art et dans la peinture en particulier.