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Les louves de Machecoul

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Alexandre Dumas (1802-1870)

"S’il vous est arrivĂ© par hasard, cher lecteur, d’aller de Nantes Ă  Bourgneuf, vous avez, en arrivant Ă  Saint-Philbert, Ă©cornĂ©, pour ainsi dire, l’angle mĂ©ridional du lac de Grand-Lieu, et, continuant votre chemin, vous ĂȘtes arrivĂ©, au bout d’une ou deux heures de marche, selon que vous Ă©tiez Ă  pied ou en voiture, aux premiers arbres de la forĂȘt de Machecoul.

LĂ , Ă  gauche du chemin, dans un grand bouquet d’arbres qui semble appartenir Ă  la forĂȘt, dont il n’est sĂ©parĂ© que par la grande route, vous avez dĂ» apercevoir les pointes aiguĂ«s de deux minces tourelles et le toit grisĂątre d’un petit castel perdu au milieu des feuilles.

En 1832, ce petit castel Ă©tait la propriĂ©tĂ© d’un vieux gentilhomme nommĂ© le marquis de Souday, et s’appelait le chĂąteau de Souday, du nom de son propriĂ©taire.

Le marquis de Souday Ă©tait l’unique reprĂ©sentant et le dernier hĂ©ritier d’une vieille et illustre Maison de Bretagne ; le marquis de Souday, dĂ©jĂ  hĂ©ritier, sinon des biens – il n’en restait d’autres que la petite gentilhommiĂšre que nous avons dite – du moins du nom de son pĂšre, Ă©tait le premier page de Son Altesse royale Monsieur le comte de Provence.

À seize ans – c’était l’ñge qu’avait alors le marquis, – les Ă©vĂ©nements ne sont guĂšre que des accidents ; il Ă©tait, au reste, difficile de ne pas devenir profondĂ©ment insoucieux Ă  la cour Ă©picurienne, voltairienne et constitutionnelle du Luxembourg, oĂč l’égoĂŻsme avait ses coudĂ©es franches.

C’était Monsieur de Souday qui avait Ă©tĂ© envoyĂ© sur la place de GrĂšve pour guetter le moment oĂč le bourreau serrerait la corde autour du cou de Favras, et oĂč celui-ci, en rendant le dernier soupir, rendrait Ă  Son Altesse royale sa tranquillitĂ© un instant troublĂ©e.

Il Ă©tait revenu Ă  grande course dire au Luxembourg :

– Monseigneur, c’est fait !

Et monseigneur, de sa voix claire et flûtée, avait dit :

– À table, messieurs ! à table !"

Pays de Retz, 1831. Le marquis de Souday, ancien aide de camp du chef vendĂ©en Charette, est revenu au pays avec ses deux filles, jumelles et bĂątardes, Bertha et Mary. Elles n'ont pas bonne rĂ©putation (Ă  tort) et sont surnommĂ©es les "louves". La vie se passe tranquillement jusqu'au jour oĂč elles rencontrent le jeune Michel de la Logerie dont elles tombent amoureuses. C'est aussi Ă  cette Ă©poque que la duchesse de Berry dĂ©cide de mener le combat armĂ©, dans l'Ouest, afin de reconquĂ©rir le trĂŽne de France pour son fils Henri V... Elle entraĂźne dans ce complot le marquis et les jumelles...