Henry Cauvain (1847-1899)
"Par une belle soirĂ©e du mois dâavril 1870, Rosa Valentin Ă©tait assise dans le jardin de son pĂšre, lâexcellent syndic de Coursolles. Elle avait un livre sur ses genoux et montrait Ă lire Ă un petit garçon debout prĂšs dâelle.
Le soleil couchant jetait ses rayons rougeĂątres sur les fleurs fraĂźchement arrosĂ©es et faisait luire, comme autant dâĂ©tincelles, les gouttelettes suspendues Ă leurs pĂ©tales.
Rosa Ă©tait vĂȘtue fort modestement dâune robe de laine noire qui, malgrĂ© sa simplicitĂ©, faisait ressortir la forme ravissante de ses Ă©paules et les contours dĂ©licatement arrondis de son sein. Il y avait en elle quelque chose qui Ă©blouissait. CâĂ©tait un resplendissement de jeunesse et de beautĂ©.
Lâenfant, debout prĂšs dâelle, formait avec cette adorable fille un singulier contraste. II Ă©tait petit et mince ; ses joues pĂąles, ses Ă©pais cheveux noirs groupĂ©s en dĂ©sordre autour de son front, le pli qui marquait ses lĂšvres, donnaient Ă son visage une expression vieillotte qui nâĂ©tait point celle des enfants de son Ăąge. Il eĂ»t peut-ĂȘtre semblĂ© laid, si lâĂ©clat de deux yeux noirs pleins de feu nâĂ©tait venu parfois, Ă©clairer, comme le reflet dâune flamme intĂ©rieure, sa figure fatiguĂ©e.
Cet enfant Ă©tait Julien Brunet. Son pĂšre, un fabricant dâhorloges, Ă©tait mort deux ans auparavant. En voulant passer la Riole un soir dâhiver, il Ă©tait tombĂ© dans un trou et sâĂ©tait noyĂ©."
1870, Coursolles dans le Jura. Rosa est amoureuse de Germain, un peintre suisse nouvellement arrivĂ©. Tout va pour le mieux entre eux ; un mariage est mĂȘme annoncĂ©... Mais la situation se dĂ©grade et personne ne peut imaginer l'horrible drame qui est proche...