Delly (1875-1947) (1876-1948)
"La brise, saturĂ©e du parfum des orangers, soulevait le journal Ă©tendu sur la table. Gemma pencha la tĂȘte pour relire lâannonce :
« On demande jeune personne de bonne famille, munie de diplĂŽmes, pour instruire deux petites filles. Ăcrire avec tous renseignements et rĂ©fĂ©rences Ă la comtesse de CamparĂšne, Grand-HĂŽtel, Ă Cannes. »
De longues coulĂ©es de soleil pĂ©nĂ©traient jusquâau milieu du salon vieillot, dont les murs tendus de toile de Jouy fanĂ©e sâornaient de portraits encadrĂ©s dâune dorure ternie. Sur la petite terrasse, dans des vases en terre vernissĂ©e, de hautes digitales offraient la pourpre vive et le rose tendre de leurs clochettes. Le jardin sâĂ©tendait au-delĂ , abondamment fleuri, bien que nĂ©gligĂ© depuis la mort de Mme Faublans.
Gemma repoussa le journal et sâaccouda Ă la table. La chaude lumiĂšre de mars avivait les reflets moirĂ©s des cheveux blonds formant des boucles lĂ©gĂšres sur la nuque dĂ©licate, dâun blanc de nacre. De cette mĂȘme blancheur nacrĂ©e, Ă peine teintĂ©e de rose tendre, Ă©tait le jeune visage sĂ©rieux aux beaux yeux songeurs et soucieux.
Une porte claqua tout Ă coup, des pas rĂ©sonnĂšrent sur le dallage du vestibule. Au seuil du salon parut une jeune fille vĂȘtue de demi-deuil. Elle jeta sur un siĂšge le carton Ă musique quâelle tenait Ă la main, et se laissa tomber sur le petit canapĂ© dont la soie sâĂ©limait."
Mahault et Gemma, deux soeurs, répondent à une offre d'emploi d'institutrice. Elles se retrouvent dans un chùteau proche de Nice. L'atmosphÚre du lieu et le comportement des habitants leur paraissent étranges... Y aurait-il du danger ?