Emmanuel Bove (1898-1945)
"En arrivant à Paris, Mme Louise Aftalion, qui était accompagnée de son fils Nicolas, se fit aussitôt conduire chez sa sœur, Thérèse Cocquerel, qu’elle avait perdue de vue depuis plus de quinze ans. Celle-ci occupait, avec son mari, tout près de l’École militaire, un appartement de six pièces situé au cinquième étage d’un vieil immeuble, où le propriétaire, à la fois par goût de rajeunissement et esprit de lucre, faisait installer le confort moderne au fur et à mesure que les appartements étaient vacants, aux fins de doubler les loyers. Ils étaient ridiculement modestes. Ainsi, l’appartement des Cocquerel, dont presque toutes les fenêtres donnaient sur l’avenue Bosquet, était d’un loyer annuel de deux mille francs. Thérèse y avait fait installer une salle de bain dans un cabinet de débarras. Comme il n’y avait aucune fenêtre, en quelques secondes la vapeur ternissait les glaces cependant qu’un nuage s’amoncelait sous le plafond. Le salon se trouvait à un angle de la maison. À cause de cela, ainsi que des longues fenêtres qui descendaient jusqu’au plancher, il était glacial en hiver. Tout ce qui se trouvait dans cette pièce avait une allure provinciale. Un album de photographies à fermeture de cuivre était posé sur une console. Pour l’emplir, Benjamin, le mari de Thérèse, y avait adjoint des cartes postales, des vues qu’il découpait en dedans afin qu’aucun liséré blanc n’en trahît l’origine. Partout traînaient des coquillages, des clochettes, des souvenirs de plages. Deux portraits de Mme Perrier, la mère de Thérèse Cocquerel et de Louise Aftalion, ornaient les murs."
Louise Aftalion vient de perdre son époux Alexandre. Elle décide de s'installer à Paris, avec son fils de 23 ans : Nicolas. Ils sont hébergés par Thérèse - la soeur de Louise - et son mari. Mais ceux-ci n'ont pas la même vision de la vie que Louise et Nicolas... Les Aftalion décident de s'installer ailleurs mais leur argent file vite...