Depuis qu’il se prétend « social », le web regorge de formats industriels qui standardisent les manières de se représenter et de se raconter. En quelques années, l’identité est devenue une affaire de profils, de réseaux, de fils et de mises à jour. Cette intense dynamique numérique relie désormais le quotidien des internautes aux intérêts de géants américains cotés en bourse.
Face aux injonctions permanentes de Facebook, de Twitter ou de YouTube, une question de taille hante notre époque : que fabriquent au juste les industries du web pour que tant des gens y consacrent autant de temps ? Une déconstruction historique et sémiologique de leurs dispositifs s’impose pour comprendre en quoi ces acteurs du numérique nous engagent redoutablement. Cet essai propose de regarder les écrans de près pour formuler une critique de l’expérience du Web contemporain. La tâche est d’autant plus difficile que l’objet est séduisant.
Comment analyser les formatages imposés aux représentations identitaires ? Quelles sont les implications idéologiques du like et du partage ? Jusqu’où la Toile des amis est-elle inféodée à une trame de discours ambigus ? Autant d’interrogations qui appellent à décrire en détail une sensibilité hégémonique, façonnée par des dispositifs web qui déclinent sans cesse les identités des internautes entre des positions d’auteur, de pair et de client.