Un voyage initiatique qui prend la forme d'un conte philosophique pour mieux fuir l'horreur humaine.
« Vois ! Regarde ! Les images diffusées : ce camion blanc avançant dans la foule et dévorant les corps ; le conducteur relançant sa machine quand elle ralentit, détruisant la vie. Je ne sais pourquoi, j’ai absolument, tout de suite, associé le camion à Moby Dick. »
L’attentat de Nice choque tellement l’homme qui parle qu’il s’embarque avec fièvre sur son voilier en Méditerranée et file vers les Açores à la recherche du monstre à terrasser, comme une image du mal qui ronge notre monde. Une odyssée en solitaire, où il parlera aux éléments, aux animaux et à des naufragés, morts ou vivants, avant de croiser son destin. Un voyage initiatique, plein de fantaisie et de gravité, comme un conte philosophique.
Cachalot est un roman tour à tour aussi précis que Naufragé Volontaire d’Alain Bombard et aussi inquiétant que les Chants de Maldoror de Lautréamont.
EXTRAIT
Lorsque je vois la mort submerger la foule, tel un tsunami venu du fond de l’Antiquité grecque, je sens qu’une partie de moi est hébétée, comme si la lumière que j’ai reçue de cette ville s’était assombrie au point de me faire tâtonner. Une sensation de panique m’oppresse alors. Je ne peux attendre que le quotidien anesthésie la tristesse. Si je veux entreprendre quelque chose, cela doit débuter à Nice, où ma vie avait entamé un chemin de liberté, en liant l’amour de la mer et l’éblouissement de la littérature. Il ne m’est pas possible de rester à Paris, où j’ai émigré pour me rapprocher de mes illusions, sans tenter d’agir pour chasser la violence de notre temps. Quelque part en ce monde, quelque chose doit être combattu pour que des êtres cessent de désirer le néant, cessent de désirer engloutir d’autres hommes.
J’abandonne à contrecœur mon travail de surveillant dans un collège de Sarcelles, un travail chaleureux au sein d’un tourbillon de vie, où l’échange de regards est à la base de l’échange des idées, où l’avenir semble plus impalpable que la poussière des rêves, mais où les sourires et l’énergie de vivre font sentir que rien n’est jamais écrit, que rien n’est jamais sans espoir de beauté et de liberté. Si certains lieux de notre âme semblent des abîmes de misère et de malheur, c’est parce que nous avons trop souvent détourné le regard de l’humain, pour ne le penser qu’en intention de réussite matérielle. À la base de ce modeste emploi, il y a la simple bienveillance. Si on n’offre à un enfant que des murs pour horizon, il choisira le plus facile à escalader, pour découvrir que, derrière cette barrière, il existe une cave de la pensée. Faire demi-tour, alors, sera au-dessus de ses forces. La bienveillance, qui n’est pas une séduction, qui n’est pas une manipulation, ni une domination, pas plus qu’un angélisme, demande simplement de voir partir l’autre avec la confiance d’être, sans se retourner. Elle est une brèche dans n’importe quel mur.
Ă€ PROPOS DE L'AUTEUR
Né en 1970 à Brest, Daniel Besace devient mousse à 16 ans et fait le tour du monde comme timonier sur un navire militaire. À 27 ans, il marche de Bayonne à Saint Malo, expérience racontée dans Océan. En 1998, il fait le tour de la péninsule Ibérique à vélo. Fondateur de la maison d’édition artisanale Carnets-Livres, il a fabriqué 15 000 livres à la main. Cachalot est son premier roman.