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Ils travaillent au noir

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Officiellement le travail au noir reprĂ©sente en France 5 % du PIB, soit un manque Ă  gagner d'une dizaine de milliards d'euros pour l'État. Officieusement, ce chiffre serait nettement supĂ©rieur, avoisinant les 10 %. Qui n'a jamais travaillĂ© au noir ou acceptĂ© qu'on travaille au noir pour lui ? Une pelouse Ă  faire tondre, un enfant Ă  garder, une tuyauterie Ă  faire rĂ©parer ? DĂšs que cela nous paraĂźt plus simple, Ă©conomique ou pratique, nous n'hĂ©sitons pas Ă  franchir la frontiĂšre lĂ©gale en oubliant, comme le rappelle la loi, que le travail dissimulĂ© est une infraction passible d'amendes et de poursuites. Mais la rĂ©alitĂ© du travail au noir devient autrement plus complexe lorsque ce sont des entreprises qui ne dĂ©clarent pas leurs salariĂ©s ou lorsque, par contrainte plus que par choix, le travail au noir devient, pour certains, la seule façon de survivre. On est alors loin du petit boulot qui dĂ©panne ou du simple service rendu. L'État a beau tenter de lĂ©gifĂ©rer et durcir le ton, la rĂ©alitĂ© du travail au noir perdure. Pire, elle gagne du terrain et touche aujourd'hui de plus en plus de secteurs.

" Ils ont été faciles à trouver et difficiles à faire parler ", révÚle Hubert Prolongeau au terme de son investigation. Parti sur le terrain pour rencontrer ceux pour qui le travail au noir est désormais synonyme de quotidien, le journaliste s'est d'abord confronté à un mur de silence. Le travail au noir, on le pratique mais on n'en parle pas. Motus. C'est finalement sous couvert d'anonymat que la plupart des contacts établis ont choisi de lever le voile sur leur vie professionnelle et accepté de raconter leur histoire.

Modeste a quittĂ© le Rwanda et distribue des prospectus Ă  Paris. Il a longtemps habitĂ© dans un squat. Singh, venu du Bangladesh, vend des petites tours Eiffel face Ă  l'esplanade du TrocadĂ©ro. Mme Zhou, venue de Chine, travaille depuis plusieurs annĂ©es dans les ateliers de confection Ă  Aubervilliers. Tadesz, le Polonais, Ɠuvre sur les chantiers. Le travail est lĂ  mais tous sont prĂ©caires et fragilisĂ©s socialement. Pareil pour Marie, la nounou, Mme Carvalo, la concierge, Marie-Jeanne, l'ancienne corsetiĂšre de chez Lejaby, qui est devenue femme de mĂ©nage aprĂšs son licenciement. Sillonnant le pays, Hubert Prolongeau dresse le portrait mĂ©connu de cette France silencieuse.

Comment en sont-ils arrivés là ? Peuvent-ils s'extraire de la logique pernicieuse ? Au travers des témoignages recueillis, on découvre des vies entiÚres assujetties à la loi du silence et à l'usure de la précarité.