Pierre Alexis Ponson du Terrail (1829-1871)
"Il était deux heures du matin. Il y avait un an, heure pour heure, que M. de Maurevers avait disparu, et l’on parla de lui.
– Messieurs, dit un tout jeune homme, reçu de la veille, au Club des Crevés, car c’était dans le salon de jeu de cet intéressant local de high life que cette conversation s’engageait, je vous demande mille pardon, mais je sais si imparfaitement l’histoire du marquis Gaston de Maurevers, que je serais bien reconnaissant à celui qui voudrait me la raconter.
Le vicomte de Montgeron répondit :
– Je suis ton parrain, Casimir, et à ce titre je te dois des révélations. Sache donc que Gaston de Maurevers était un homme de trente-six ans, beau, élégant, d’éducation accomplie, et riche de cent vingt mille livres de rente.
On ne lui connaissait ni chagrin, ni amour, ni aucun motif raisonnable de quitter la vie.
– Cependant il s’est suicidé ?
– Mais non, voilà ce qu’on ne sait pas. Un soir, il est sorti d’ici, avec Charles Hounot, le fils du banquier.
Ils sont remontés à pied jusqu’à la Madeleine. Le marquis habitait un grand entresol, à l’entrée de la rue de Surène.
Charles l’a mis à sa porte et ils se sont séparés en se disant : « à demain. »
Tome III : "La Belle Jardinière".
Suite de "Les millions de la bohémienne".