Thomas Witlam Atkinson (1799-1861)
"Je venais de parcourir l’Altaï. La vallée du Bia, où s’étale l’Altin-Kool, – le lac d’Or, – m’avait offert des paysages qui ne cèdent en rien aux plus beaux des Alpes suisses et italiques. La vallée de la Katounia, non moins belle, m’avait conduit jusqu’au sommet du Biélouka. De ce point culminant du massif altaïque, je descendis vers le sud, résolu à aller chercher dans le Gobi des scènes qui n’avaient jamais été considérées par un œil européen et reproduites par un pinceau. Là, je savais que ma carabine serait nécessaire à autre chose qu’à conquérir mon dîner. Là le courage et le sang-froid du voyageur sont mis à l’épreuve par des gens inaccessibles à la crainte et à la fatigue. Il faut avoir la main ferme, l’œil prompt et l’habitude des armes, si l’on veut se garantir de tout acte de violence. Le pillage est le droit commun du désert, et, ce qui est pis, le voyageur qui succombe, s’il n’est pas mis à mort, est destiné à subir une captivité certaine.
Mon escorte se composait de trois Cosaques, braves et honnêtes compagnons qui eussent affronté tous les dangers. Puissent-ils vivre longtemps et heureux sur le coin de terre qu’ils habitent au pied du Kourichoum ! Je leur adjoignis sept Kalmoucks, forts et robustes chasseurs, habitués à la pénible vie des montagnes. J’avais une provision suffisante de poudre et de plomb, ainsi qu’une collection de huit carabines. Mes Kalmoucks avaient les cheveux coupés ras à l’exception d’une touffe sur le sommet de la tête, réunie en une longue tresse qui leur pendait sur le dos et leur communiquait un extérieur tout à fait chinois. De fait, ils pouvaient être considérés comme des sujets chinois. Malheureusement pour eux, la Russie les contraint aussi à lui payer une taxe."
1848. Récit de voyage de l'architecte et artiste anglais Thomas Witlam Atkinson.