VoilĂ tout juste deux cents ans, le Nord, lâEst et le Sud-Ouest de la France Ă©taient envahis par les armĂ©es coalisĂ©es (Russes, Allemands, Autrichiens au Nord ; Anglais, Espagnols & Portugais au Sud), dĂ©cidĂ©es Ă en finir dĂ©finitivement avec NapolĂ©on Ier que la dĂ©sastreuse campagne de Russie avait si considĂ©rablement affaibli. En lâespace dâun trimestre (de janvier Ă avril 1814), le sort de la France (et de lâEmpire) semble tour Ă tour sauvĂ© ou perdu, au grĂ© des batailles Ă demi-gagnĂ©es ou Ă demi-perdues par des armĂ©es françaises qui luttent le plus souvent Ă 1 contre 3 ! Mais, au final â on le sait â, la fortune tournera en dĂ©faveur dâun NapolĂ©on qui ne parvient pas Ă empĂȘcher Paris, aprĂšs une terrible bataille dans les faubourgs, de tomber aux mains des CoalisĂ©s et qui, pris dans un infernal engrenage de malchances successives, finit par abdiquer, abandonnĂ© par tous...
Le 1814 de Henry Houssaye est un ouvrage inouĂŻ oĂč lâon suit, au jour le jour, parfois mĂȘme dâheure en heure, le dĂ©roulement haletant des Ă©vĂ©nements : on se trouve sur les chemins qui mĂšnent aux champs de bataille, aux marches en avant ou aux retraites ; dans les villes assiĂ©gĂ©es, prises ou reprises, au sein des Ă©tats-majors qui Ă©chafaudent fiĂ©vreusement des plans ; au cĂŽtĂ© des marĂ©chaux, des gĂ©nĂ©raux, des politiciens du gouvernement de rĂ©gence Ă Paris et leurs (vacillants) Ă©tats dâĂąme ; enfin dans lâintimitĂ© mĂȘme de NapolĂ©on Ier et de ses soldats...
Par son style alerte, sa prĂ©cision Ă©clairante du dĂ©tail, sa minutie, son souffle dans lâĂ©vocation, sa documentation faramineuse et toujours Ă©difiante, 1814 donne la fascinante impression de remonter deux siĂšcles de temps et dâĂȘtre immergĂ© au cĆur de lâHistoire aux instants dĂ©cisifs et prĂ©cis durant lesquels elle se dĂ©roule le plus intensĂ©ment. Câest certainement un des plus brillants, des plus complets et des plus comprĂ©hensibles ouvrages sur la chute du Premier Empire.
Henry Houssaye, nĂ© Ă Paris (1848-1911), est un historien initialement spĂ©cialisĂ© dans la GrĂšce antique ; aprĂšs la guerre de 1870 (Ă laquelle il participe brillamment comme officier), il se consacre totalement Ă lâhistoire militaire de NapolĂ©on Ier et publie sur le sujet deux monumentaux ouvrages dĂ©finitifs : 1814 (en 1888) (prĂšs dâune centaine dâĂ©ditions !), et 1815, (en trois volumes). Il est Ă©lu Ă lâAcadĂ©mie française en 1894.