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Cahiers Albert Cohen N°23 : La géographie imaginaire d'Albert Cohen

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Sujet ottoman avant de devenir citoyen suisse, signant « en terre étrangère » son recueil de poèmes (Paroles juives), « arbre de Judée dans la forêt française », rebaptisant Céphalonie sa Corfou originelle, vouant à Israël un amour aussi ardent que platonique, chantre épique de l’Angleterre et de la Russie et romancier de l’exil, jouant à l’envi avec les stéréotypes nationaux et les « lieux communs » et inventeur d’utopies (caves, souterrains, ghettos), Albert Cohen se plaît à promener et à égarer son lecteur dans ses territoires de prédilection, réels ou imaginaires.

Comment se pose politiquement et se déploie poétiquement la question de l’appartenance, de l’espace politique, affectif et littéraire chez Albert Cohen ? Que nous dit, sur lui-même ou sur sa situation historique, son rapport à ses « patries » réelles ou rêvées ? Les études de ce recueil apportent leur contribution à ce qui, dans le jargon critique, a pris depuis peu le nom de géocritique, c’est-à-dire l’examen des reconfigurations imaginaires de l’espace par un écrivain : la Russie (Philippe Zard) et l’Angleterre (Alain Schaffner) à l’heure de la guerre, la Suisse (Joëlle Zagury) et la Palestine/Israël (Maurice Lugassy) sont quatre territoires clés de la géographie cohénienne – et assurément moins explorés que ne l’ont été jusque-là Céphalonie, la France et l’Allemagne. Les études de Géraldine Dolléans sur le corps comme « paysage imaginaire » et de Jack Abecassis sur les chapitres 48 et 50 de Belle du Seigneur (les chapitres « Isolde »), viennent compléter ces perspectives en donnant aux notions de lieux et de « paysage » un sens plus large que géographique.