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Contes d'un voyageur IV

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Avec ses Contes du voyageur, Irving nous convie autant au voyage et Ă  l'exotisme, qu'aux vagabondages de l'imagination, humaine et littĂ©raire, dans toute sa splendeur. Ajoutez Ă  ces rĂ©cits la traduction française bancale et dĂ©licieusement vieillotte de 1825. Extrait : Je n'avais pas de chapeau, et le sang coulait de ma blessure : je m'efforçai nĂ©anmoins de l'Ă©tancher avec mon mouchoir de poche, que je liai autour de ma tĂȘte. Le capitaine de la bande me conduisait en triomphe, croyant que j'Ă©tais le prince. Nous Ă©tions dĂ©jĂ  bien loin, quand un des ouvriers le dĂ©trompa. Sa rage fut terrible ; il Ă©tait trop tard pour retourner au chĂąteau et pour tĂącher de rĂ©parer son erreur ; car depuis ce temps, l'alarme aurait Ă©tĂ© donnĂ©e et tout le monde serait sur ses gardes. Il me lança un regard fĂ©roce... il jura que je l'avais trompĂ©, que je lui avais fait manquer sa fortune... et il me dit de me prĂ©parer Ă  la mort. Les autres brigands Ă©taient Ă©galement furieux. Je les vis porter la main Ă  leurs poignards, et je savais que la menace de la mort est rarement une vaine dĂ©monstration chez ces scĂ©lĂ©rats. Les ouvriers s'aperçurent du danger oĂč m'avait mis leur rĂ©vĂ©lation, et ils s'empressĂšrent d'assurer le capitaine que j Ă©tais un homme pour lequel le prince paierait une grosse rançon. Cet avis arrĂȘta les bandits. Quant Ă  moi je ne puis dire que je fusse fort effrayĂ© de leurs menaces. Je ne cherche pas Ă  me vanter d'un grand courage ; mais nos derniĂšres rĂ©volutions m'ont tellement familiarisĂ© avec le malheur, et j'ai vu la mort de si prĂšs dans tant de scĂšnes de pĂ©ril et de dĂ©sastre, que je me suis en quelque sorte endurci contre toute crainte. L'homme qui risque souvent sa vie finit par en faire aussi peu de cas que le joueur en fait de son argent. À leurs menaces de mort, je rĂ©pondis que le plus tĂŽt serait le mieux. Cette rĂ©ponse parut Ă©tonner le capitaine, et la perspective d'une rançon que lui faisaient entrevoir les ouvriers, eut sans doute encore plus d'effet sur lui. Il rĂ©flĂ©chit un moment, prit des maniĂšres plus calmes ; et faisant un signe Ă  ses compagnons qui attendaient mon arrĂȘt de mort. « En avant, dit-il, nous examinerons cela plus tard, Ă  loisir. »