Durant la première moitié du XXe siècle, les expositions et les foires internationales constituent un terrain d’affrontement privilégié entre les différents acteurs de la politique d’exposition. Alors que les entreprises suisses cherchent à conquérir de nouvelles positions sur les marchés extérieurs, la manière de représenter la Suisse à l’étranger fait particulièrement débat. Aux traditionnelles constructions régionalistes se substituent des aménagements aux lignes épurées, conçus selon les principes fonctionnalistes de la « construction nouvelle ». Désigné dès le milieu des années 1930 sous le terme de « style suisse », ce nouveau visage de l’architecture d’exposition, simple et rationnel, rompt avec le vocabulaire formel du « style chalet », si souvent privilégié dans les expositions universelles du tournant du XXe siècle. Loin de constituer un phénomène isolé, ces reconfigurations témoignent d’un mouvement plus large de rationalisation de l’organisation commerciale. Dans le sillage de la Première Guerre mondiale, des publications spécialisées aux foires modernes, l’efficience visuelle devient en effet un instrument incontournable de la « lutte pour les débouchés » commerciaux.
La genèse du « style suisse » d’exposition, conçue comme le fruit d’une collaboration étroite entre les acteurs de l’expansion commerciale et du mouvement de l’architecture moderne, est au coeur du présent ouvrage. Au-delà d’une histoire purement institutionnelle, ce livre apporte un éclairage inédit sur les enjeux économiques et artistiques de la politique d’exposition. Il prête une attention particulière au rôle de certains « passeurs » dans la formulation et la diffusion d’une culture visuelle de l’action commerciale.