Syndicats et patronat ont dans notre pays des prĂ©rogatives considĂ©rables et souvent mĂ©connues, que bien des Français croient dâailleurs ĂȘtre celles de lâEtat. Sait-on par exemple quâils gĂšrent ensemble, et seuls, plus de 130 milliards dâeuros de budgets sociaux ? Ou encore quâils participent directement au systĂšme judiciaire ? Quâils Ă©laborent une large part des normes sociales et du droit du travail, imposant leurs accords Ă des entreprises et des salariĂ©s qui dans leur immense majoritĂ© ne les ont jamais choisis ? Et quâils administrent en mĂȘme temps quantitĂ© dâorganismes prĂ©sents dans la vie quotidienne des Français â des assurances, des services mĂ©dicaux, des sociĂ©tĂ©s HLM, des organismes de formation⊠?
Composante essentielle du systĂšme social français, le paritarisme ne peut ĂȘtre exonĂ©rĂ© des failles de celui-ci. A plus dâun titre, les difficultĂ©s de financement ou dâadaptation de notre modĂšle social apparaissent comme lâun des problĂšmes majeurs du pays. Avec un niveau record des prĂ©lĂšvements obligatoires affectĂ©s Ă la protection sociale, ce modĂšle craque tout en Ă©crasant de son poids lâensemble des acteurs Ă©conomiques et institutionnels, bridant leur compĂ©titivitĂ© ou leur capacitĂ© dâadaptation.
Alors quâils sont dĂ©criĂ©s pour leur archaĂŻsme, leur faible reprĂ©sentativitĂ©, leur opacitĂ© ou leur mode de financement, les partenaires sociaux servent pourtant dâalibi Ă un Etat qui se dĂ©fausse sur eux et ne rĂ©forme jamais. Totems dâun dialogue social proclamĂ© comme la solution Ă toutes les difficultĂ©s, ils peuvent apparaitre comme les garants de lâimmobilisme. Le systĂšme paritaire ne serait-il pas davantage le problĂšme que la solution ?