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La loi de Lynch

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Gustave Aimard (1818-1883)

"Vers les trois heures du soir un cavalier revĂȘtu du costume mexicain, suivait au galop les bords d’une riviĂšre perdue, affluent du Rio Gila, dont les capricieux mĂ©andres lui faisaient faire des dĂ©tours sans nombre.

Cet homme, tout en ayant constamment la main sur ses armes et l’Ɠil au guet afin d’ĂȘtre prĂȘt Ă  tout Ă©vĂ©nement, excitait son cheval du geste et de la voix, comme s’il eĂ»t eu hĂąte d’atteindre le but de son voyage.

Le vent soufflait avec violence, la chaleur Ă©tait lourde, les cigales poussaient, sous les brins d’herbe qui les abritaient, leurs cris discordants ; les oiseaux dĂ©crivaient lentement de longs cercles au plus haut des airs, en jetant par intervalle des notes aiguĂ«s ; des nuages couleur de cuivre passaient incessamment sur le soleil dont les rayons blafards Ă©taient sans force, enfin, tout prĂ©sageait un orage terrible.

Le voyageur ne semblait rien voir ; courbĂ© sur le cou de sa monture, les yeux ardemment fixĂ©s devant lui, il augmentait la rapiditĂ© de sa course sans tenir compte des larges gouttes de pluie qui tombaient dĂ©jĂ , et des sourds roulements d’un tonnerre lointain qui commençaient Ă  se faire entendre.

Cependant cet homme aurait pu facilement, s’il l’avait voulu, s’abriter sous l’ombrage touffu des arbres centenaires d’une forĂȘt vierge qu’il cĂŽtoyait depuis plus d’une heure, et laisser passer le plus fort de l’ouragan ; mais un grand intĂ©rĂȘt le poussait sans doute en avant, car, tout en accĂ©lĂ©rant sa marche, il ne songeait mĂȘme pas Ă  ramener sur ses Ă©paules les plis de son zarapĂ© afin de se garantir de la pluie, et se contentait, Ă  chaque bouffĂ©e de vent qui passait en sifflant au-dessus de lui, de porter sa main Ă  son chapeau pour l’enfoncer sur sa tĂȘte, tout en rĂ©pĂ©tant d’une voix saccadĂ©e Ă  son cheval : – En avant ! en avant !"

Suite et fin de la série composée des trois romans : "le chercheut de pistes", "les pirates des prairies" et "la loi de Lynch".