« Dans un calme et un silence lourds de menaces indĂ©finies, le paquebot dĂ©versa sa cargaison humaine dans le port dâOran, Ă lâĂ©cart. [...] Puis, rassemblĂ©s sur un terre-plein au pied du drapeau de la mĂšre patrie, nous attendĂźmes deux longues heures en plein soleil au garde-Ă -vous le bon vouloir de la hiĂ©rarchie militaire. Enfin un kĂ©pi nous dĂ©livra un long discours qui se voulait de bienvenue, mais que nous nâĂ©coutĂąmes que dâune oreille distraite, tant nous avions du mal Ă rester conscients. DĂ©jĂ plusieurs de nos camarades gisaient Ă terre, abandonnĂ©s, pantins dĂ©risoires, Ă©vanouis. Les Ă©motions, la chaleur, la piqĂ»re, tout cela conjuguĂ© avaient eu raison de leur rĂ©sistance pendant que le ârigoloâ de service continuait Ă rĂ©citer dâune voix mĂ©canique. Chaud lâaccueil, qui ne laissait prĂ©sager rien de bon. Tous les soldats prĂ©sents avaient dĂ©jĂ perdu les batailles Ă venir, leur seul souci Ă partir de ce jour-lĂ Ă©tant la survie. Vous parlez dâune motivation ! »