À mi-chemin entre la remise et le camper, que j’avais garé exprès loin de la maison, j’entends, derrière moi, une voix que secrètement j’espérais entendre. Quand l’occasion se présente de débarrasser le monde d’une nuisance durable, il faut sauter sur cette opportunité de faire une bonne œuvre. Tenant toujours par la taille Christine, qui est pieds nus dans la gravelle, je me retourne lentement, pointant le canon de 357 entre les yeux de Charlie. Il s’est dessiné au crayon-feutre une croix gammée à l’endroit où justement j’ai le goût de lui mettre une balle. Il est avec Tynette, qui est flambante nue. Elle est aussi poilue qu’un bûcheron. On dirait qu’elle s’est collé une marmotte entre les jambes. Charlie rit. J’engage le chien du revolver..,
Voici la troisième et dernière de François Du Paradis, un personnage rocambolesque. Né vers 1915, Il va traverser, avec armes et bagages, la quasi-intégralité du vingtième siècle. La chose se jouera cul par-dessus tête, en vivant une existence totalement différente de ce qu'il avait pu prévoir ou anticiper. Tout y passe : Années folles, Deuxième Guerre mondiale, Trente Glorieuses, maccarthysme, époque underground de la contre-culture, même une touche de millénarisme. Rien ne nous est épargné. Et on étale et déploie devant soi peut-être le premier regard littéraire qu'arrive à porter le vingt-et-unième siècle sur celui qui fut, de tous les points de vue, un vrai siècle catastrophique, sanglant, perturbant, artistique, mélancolique. Bref, un siècle de fous.
Pierre Charles Généreux porte bien son nom. Il est un romancier d’action puissant, riche, nuancé, cinématographique, doublé d’un peintre de caractère merveilleux. Son récit se déploie à un rythme de charge. Le tout prend corps, en manifestant une capacité d'évocation à la fois perfectionnée et suave.