Le fleuve à vif, premier recueil de poésie de Katia Lemieux aux Écrits des Forges, est porté par des images très visuelles qui savent faire ressentir les effets des drames vécus par les gens qui vivent tout près des voies d’eau:
combien sont disparus
dans le détroit d’Honguedo
et dans celui de Jacques-Cartier
en Gaspésie
vers le golfe en aval menant à l’Atlantique ?
Qu’elle soit fleuve ou mer, l’eau règne sur la vie des riverains en maîtresse intraitable. Sa voix accompagne le paysage et les humains qui la côtoient. L’eau est aussi lieu, mémoire : la géographie positionne les habitats et inscrit à jamais le souvenir de ceux qui disparaissent dans ses colères :
Sept-ĂŽles en haute terre
l’emporte sur les prés verdoyants la Malbaie
entrevus dessous
des os rompus roulent vers le large
le détroit d’Honguedo
Les naufrages et les noyades marquent profondément la vie des humains qui ont des interactions avec le fleuve ou la mer. Les paysages sont imprégnés de clair-obscur et d’absence; de bourrasques et de deuils. Et puisque « des brisants émerge la menace », la beauté du littoral se transforme parfois et il arrive qu’une petite fille y perde son enfance. Alors :
l’eau cambre ses volutes
le vent avale les mots
emporte le ton
Cette poésie fait vibrer les paysages et les habitants de l’Est du Québec avec des mots simples et des images émouvantes.