Fanny Loviot (?-?)
"En lâannĂ©e 1852, par une belle journĂ©e de printemps, je me rendais au Havre avec lâintention de mâembarquer pour la Californie. Jâaccompagnais ma sĆur aĂźnĂ©e, que des affaires commerciales et lâespoir dâune prompte fortune attiraient dans ce pays. Or, nous passĂąmes quelques jours en cette ville, et le 30 mai, jour de la PentecĂŽte, nous nous embarquĂąmes sur une petite goĂ©lette qui avait nom lâIndĂ©pendance.
Outre le capitaine, lâarmateur et lâĂ©quipage, notre navire emportait dix-huit passagers, la plupart maris et femmes, un tiers cĂ©libataires, et tous animĂ©s dâun dĂ©sir de prospĂ©ritĂ© que lâon concevra facilement.
Au moment de mettre Ă la voile la foule encombrait le quai, et nous entendions les uns et les autres se rĂ©crier, non sans quelque effroi, sur la petitesse de notre goĂ©lette. « Jamais, disaient-ils, elle ne pourra doubler le cap Horn ; ce nâest quâune coquille de noix que le moindre coup de vent fera chavirer, etc. » Quâon juge de lâimpression produite par de telles paroles sur des Parisiennes qui, comme ma sĆur et moi, voyageaient pour la premiĂšre fois ; nous nous regardĂąmes avec quelque hĂ©sitation, mais il nâĂ©tait plus temps.
Quelques minutes aprĂšs, nous entendĂźmes la voix du capitaine qui criait "LĂąchez les amarres !..."
Souvenirs de voyage.
1852. Fanny Loviot, jeune Parisienne, s'ennuie à la Capitale et décide d'accompagner sa soeur aßnée en Californie...