George Sand (1804-1876)
"Le jeune prince Karol de Roswald venait de perdre sa mĂšre lorsquâil fit connaissance avec la Floriani.
Il Ă©tait plongĂ© encore dans une tristesse profonde, et rien ne pouvait le distraire. La princesse de Roswald avait Ă©tĂ© pour lui une mĂšre tendre et parfaite. Elle avait prodiguĂ© Ă son enfance dĂ©bile et souffreteuse les soins les plus assidus et le dĂ©vouement le plus entier. ĂlevĂ© sous les yeux de cette digne et noble femme, le jeune homme nâavait eu quâune passion rĂ©elle dans toute sa vie : lâamour filial. Cet amour rĂ©ciproque du fils et de la mĂšre les avait rendus exclusifs, et peut-ĂȘtre un peu trop absolus dans leur maniĂšre de voir et de sentir. La princesse Ă©tait dâun esprit supĂ©rieur et dâune grande instruction, il est vrai ; son entretien et ses enseignements semblaient pouvoir tenir lieu de tout au jeune Karol. La frĂȘle santĂ© de celui-ci sâĂ©tait opposĂ©e Ă ces Ă©tudes classiques, pĂ©nibles, sĂšchement tenaces, qui ne valent pas toujours par elles-mĂȘmes les leçons dâune mĂšre Ă©clairĂ©e, mais qui ont cet avantage indispensable de nous apprendre Ă travailler, parce quâelles sont comme la clef de la science de la vie. La princesse de Roswald ayant Ă©cartĂ© les pĂ©dagogues et les livres, par ordonnance des mĂ©decins, sâĂ©tait attachĂ©e Ă former lâesprit et le cĆur de son fils, par sa conversation, par ses rĂ©cits, par une sorte dâinsufflation de son ĂȘtre moral, que le jeune homme avait aspirĂ©e avec dĂ©lices. Il Ă©tait donc arrivĂ© Ă savoir beaucoup sans avoir rien appris."
Salvator, amĂšne son ami Karol en Italie afin de lui changer les idĂ©es. Karol est un jeune homme dĂ©primĂ©, plein de prĂ©jugĂ©s, vivant mal la mort de sa mĂšre. Lors de leur voyage, les deux jeunes hommes s'arrĂȘtent Ă Iseo ; Salvator apprend que son amie, l'actrice Lucrezia Floriani, y sĂ©journe...