Paul Féval fils (1860-1933)
"Sur une des places de l’orgueilleuse Burgos, patrie du Cid, un cercle s’était formé autour de deux jeunes filles, des gitanitas.
L’une d’elles dansait à ravir le fandango et, pour l’admirer, il n’y avait pas que des muletiers, des aguadors et des duègnes : l’hôtel de la Capitainerie générale avait toutes ses fenêtres ouvertes, garnies de señoritas qui jetaient des piécettes blanches et cessaient de jouer de l’éventail pour applaudir.
Burgos aime la musique, le son des tambours, les clochettes qui tintinnabulent. La légende du Campéador a mis dans le cœur de chacun de ses habitants une poésie vague qui, ne trouvant pas toujours à rythmer le cliquetis des épées, tire prétexte de tout ce qui est symphonie, bruit de castagnettes, voix d’or, pour s’élever à hauteur des innombrables clochers qui tintent tout le jour. En aucune ville d’Espagne les cloches ne sonnent autant qu’à Burgos.
Les deux gitanitas qui attiraient ainsi la foule n’avaient entre elles aucun point de ressemblance. Celle qui dansait était brune, souple et légère ; sa bouche était fraîche, ses yeux éclatants et parfois un rire sec, au sortir de ses lèvres, claquait comme un coup de fouet."
Suite des "Chevauchées de Lagardère".