Au cœur du grand marché de Gbèwi vit une population singulière de gamins que les usagers appellent « Dogbè », mais eux-mêmes préfèrent se nommer : « vigiles du marché ». Ceux-là dont le tribunal populaire a fait des indésirables, sont pourtant ceux qui y rendent de précieux services, assurent la sécurité des marchandises, donnent des informations précieuses et veillent sur le marché quand les marchands et les passants l’abandonnent la nuit pour aller se coucher dans de douillets lits. C’est ce groupe de gamins aux habitudes curieuses qu’Ola vient rejoindre après avoir fugué de chez son oncle. En compagnie d’autres vigiles, comme son ami Ahmadou, il découvre des égouts humains qu’il ne pouvait soupçonner. Ce fut une aventure qui imprima en son âme de secrètes évidences :
« Je pars en sachant que se trouvent par dizaine tapis dans des coins inimaginables de ce marché des enfants et des garçonnets qui souffrent un lent martyre. Je pars avec la conviction née du parcours d’Ahmadou que le dernier mot reste le nôtre. Je pars dans l’espoir qu’un jour chaque « vigile du marché » sortira de ce trou à galère, pour retrouver quelque part, les rayons d’affection qui lui permettront de marcher vers le bonheur sans devenir précocement adultes. Je pars en pensant que ma dulcinée aura un Don Juan de moins et peut-être aussi un ange de moins. Qui prendra soin d’elle contre ces vampires assoiffés d’âmes innocentes et vulnérables ? Je pars en saluant la bravoure des « vigiles » qui sacrifient au bonheur de ce marché leurs âmes laissées-pour-compte ».