Le 7 février 1971 les Suissesses obtiennent le droit de vote. Pour que les femmes suisses accèdent à un droit accordé aux hommes en 1848 déjà, il aura fallu 120 ans et plus de 90 votations – communales, cantonales, fédérales. Pour y arriver, les femmes se sont organisées et largement mobilisées, parfois soutenues par des hommes féministes. Elles ont écrit des essais et des pamphlets, fait campagne, donné des conférences, pétitionné. Pendant tout ce temps, la ligne de partage pour l’accès aux droits démocratiques reste une ligne de genre, qui accorde à tous les hommes ce dont toutes les femmes sont exclues.
Cette exclusion, dite « naturelle » par certains, est contestée et débattue pendant plus d’un siècle. La citoyenneté politique forme en effet le coeur des démocraties modernes. Son rôle pour la constitution de l’État, de la société et de la chose publique est fondamental.
L’exemple de la Suisse démontre de manière remarquable à quel point le concept et la pratique de la citoyenneté sont historiquement marqués par la différenciation de genre. Le particularisme suisse, ce retard, est un révélateur non seulement des principes, mais aussi des usages et des représentations de la démocratie moderne.
Fondamentalement, l’histoire du suffrage féminin met en lumière le fait que la définition de la démocratie est un enjeu politique et sociétal, objet de luttes et de controverses parfois extrêmement violentes.