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L'Enfantude

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"Je tends le dos
" était-ce là son univers, son avenir??? Parlons-en de ce présent, de cet avenir "les étoiles pourrissent dans les marais du ciel"
Cette phrase l'avait harcelée et lui revenait encore aujourd'hui, aussi dure, aussi tranchante.

Ces quelques mots abscons pour une enfant de 8 ans, dont elle pressentait instinctivement la cruautĂ© sans en comprendre tout Ă  fait le sens profond, mots revolver, mots assassins, elle les avait pendant tant d'annĂ©es entendues, rĂ©pĂ©tĂ©es, retournĂ©es dans sa tĂȘte, dans l'ordre, le dĂ©sordre; "les Ă©toiles qui pourrissent, les marais, le ciel
" comment les Ă©toiles si brillantes pouvaient -elles pourrir et le ciel Ă©tait parfois si pur, ce ne pouvait ĂȘtre qu' un mensonge, une erreur, une invention des adultes
.

une punition
Cette phrase la terrifiait comme l'inévitable, une fatalité à laquelle on ne pouvait échapper.

Définitivement, comme une porte fermée, une impossibilité d'avancer, une fin, une condamnation.

C'Ă©tait s'arrĂȘter de respirer, fermer les yeux Ă  la lumiĂšre, les oreilles Ă  la musique
 Ces mots lui labouraient le cƓur, lui massacraient la vie, l'empĂȘchaient de dormir la nuit. Comment s'en dĂ©barrasser, Ă©vidence qui s'Ă©tait abattue sur elle et lui avait fait si mal au point de l'atrophier, la faire devenir bossue, bancale


Se réveiller, se délivrer, se déployer, refuser, résister, faire éclater ce carcan de misÚre crasseuse, partir pour oublier. Elle avait bien sûr un jardin secret, un lieu inventé pour se reconstruire, un moment d'exister; elle soignait, rallumait chaque étoile, rendait brillant le soleil, donner vie à ces marais, y semait des herbes folles, plantes caresses


S’arracher Ă  ce cauchemar, comme Ă©couter quelques annĂ©es plus tard, dans cette cour d'un charcutier au milieu des odeurs de tripes, les poĂšmes d’Aragon.....

"Toujours cette puissance de connaissance de l'Ăąme"

/ Anne Tiddis /