Circatrices, c’est la poésie de ceux qui veulent mal l’entendre. À peu près et de loin. La déraison d’être, l’autre «autre», l’orgasme annihilateur du moindre souffle, le désir d’indifférence, le «je» régénérateur, le «moi» enclavé, le «vous» à fleur de peau cisaillée, tous immunisent, comme des leucocytes, contre la plaie de la distance, et contre la lésion laissée par l’espoir pendant la vie qui meurt en réaction acuponctuelle. Des récits d’amour et de mort ; une nécromanie, ainsipide, en quête d’une tendre fin. Le papier est tissu, au même titre que la peau. Le moindre mot l’ébrèche, le déchire, le stigmatise. Le papier coupe sous les ongles ; seul l’espace cicatrise.
Je suis né avec le vertige.
La chute vers l’inconnu.
L’angoisse de vivre.
L’asthme du trop-plein.
Je suis né sans savoir comment faire ;
c’est pourquoi « naître » est un verbe d’état.
J’ai cessé de craindre la mort puisque
je ne peux comprendre la naissance.
La poésie ne doit pas exprimer les événements ; elle doit les créer et les circonscrire, sans limites. Entre «déjà » et «peut-être», entre «jamais» et «sans doute», entre «je» et «vous», il y a l’instant.