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Histoire de France

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L'aimable mot de Renaissance ne rappelle aux amis du beau que l'avénement d'un art nouveau et le libre essor de la fantaisie. Pour l'érudit, c'est la rénovation des études de l'antiquité; pour les légistes, le jour qui commence à luire sur le discordant chaos de nos vieilles coutumes.

Est-ce tout? À travers les fumĂ©es d'une thĂ©ologie batailleuse, l'Orlando, les arabesques de RaphaĂ«l, les ondines de Jean Goujon, amusent le caprice du monde. Trois esprits fort diffĂ©rents, l'artiste, le prĂȘtre et le sceptique, s'accorderaient volontiers Ă  croire que tel est le rĂ©sultat dĂ©finitif de ce grand siĂšcle. Le que sais-je? de Montaigne, c'est tout ce qui voyait Pascal; et Bossuet, dans cette pensĂ©e, Ă©crivit ses Variations.

Ainsi ce colossal effort d'une révolution, si complexe, si vaste, si laborieuse, n'eût enfanté que le néant. Une si immense volonté fût restée sans résultat. Quoi de plus décourageant pour la pensée humaine? Ces esprits trop prévenus ont seulement oublié deux choses, petites en effet, qui appartiennent à cet ùge plus que tous ses prédécesseurs: la découverte du monde, la découverte de l'homme.

Le XVIe siĂšcle, dans sa grande et lĂ©gitime extension, va de Colomb Ă  Copernic, de Copernic Ă  GalilĂ©e, de la dĂ©couverte de la terre Ă  celle du ciel. L'homme s'y est retrouvĂ© lui-mĂȘme. Pendant que Vesale et Servet lui ont rĂ©vĂ©lĂ© la vie, par Luther et par Calvin, par Dumoulin et Cujas, par Rabelais, Montaigne, Shakespeare, CervantĂšs, il s'est pĂ©nĂ©trĂ© dans son mystĂšre moral. Il a sondĂ© les bases profondes de sa nature. Il a commencĂ© Ă  s'asseoir dans la Justice et la Raison. Les douteurs ont aidĂ© la foi, et le plus hardi de tous a pu Ă©crire au portique de son Temple de la VolontĂ©: «Entrez, qu'on fonde ici la foi profonde.»

Profonde en effet est la base oĂč s'appuie la nouvelle foi, quand l'antiquitĂ© retrouvĂ©e se reconnaĂźt identique de coeur Ă  l'Ăąge moderne, lorsque l'Orient entrevu tend la main Ă  notre Occident, et que, dans le lieu, dans le temps commence l'heureuse rĂ©conciliation des membres de la famille humaine.