(0)

Le type d'Antibes

E-book


Il est embringuĂ© dans une peinture d’éternitĂ©. Il a l’ñge du Christ et davantage. Il saute en fils du crucifix. Il s’emmĂȘle dans les barbelĂ©s du ciel. Les arbres sont des cadavres debout. À l’extrĂ©mitĂ© de la mer, on sent la cruautĂ© de l’hiver. StaĂ«l, c’est le type d’Antibes qui pousse la musique Ă  plein tube. Sa cuiller racle l’émail de l’assiette. Il finit sa soupe. La fulgurance est une marque de fabrique, une nĂ©cessitĂ© tellurique, comme un deuil de naissance. Il s’est levĂ© Ă  l’heure du soleil couchĂ©. Les broussailles d’atelier sont des figures travaillĂ©es. Il enjambe la peinture. Il ne sera pas ce peintre-lĂ . Il tire un trait. Il regarde le ciel. Il se dĂ©fenestre. Le pinceau avait anticipĂ© le saut. Neuf ans avant, au sortir de la guerre, le peintre avait figurĂ© son geste. La toile baptisĂ©e La Vie Dure tĂ©moigne, poigne, bouleverse. On voit l’atelier endiablĂ©, un corps d’homme filiforme jetĂ© dans le vide, StaĂ«l dĂ©gringolĂ© de l’échelle. « Mais ce que j’ai, c’est une formidable volontĂ© de faire toujours plus fort, plus aigu, plus raffinĂ©, toujours plus absolu, avec au bout l’idĂ©e du chef-d’Ɠuvre suprĂȘme qui serait fait d’une ligne et de vide. »

À PROPOS DE L'AUTEUR

Christian de Maussion vit dans un pays ensoleillĂ©, Ă©toilĂ© de jolies phrases, qui s’appelle « La langue française ». Il y sĂ©journe Ă  l’annĂ©e depuis ses premiĂšres assiduitĂ©s d’écolier. Ce douziĂšme rĂ©cit figure un exercice d’admiration, esquisse d’instinct un geste de salutation Ă  l’endroit de Nicolas de StaĂ«l. Un jour, l’auteur, au terme de l’aventure, rĂ©unira ses textes sous un seul titre : "La plus belle fille du monde". L’auteur aime lire, Ă©crire, ne rien faire. À ses heures, il rĂ©dige des chroniques pour Service LittĂ©raire.