Théophile Gautier (1811-1872)
"Plusieurs calèches, crottées jusqu’aux capotes, attelées de chevaux de poste fumants, arrivèrent à de petites distances l’une de l’autre, avec un grand tintamarre de coups de fouets et de grelots, devant la porte d’un des plus célèbres restaurateurs du Palais-Royal, vers 6 ou 7 heures du soir, un jour qu’il y avait eu sur les rives de la Bièvre une de ces courses au clocher, entremêlées d’averses, où les gentlemen-riders auraient autant besoin de parapluies que de cravaches.
Il sortit des voitures quelques hommes, dont aucun n’était vieux, et quelques jeunes femmes à qui un goût sévère n’aurait guère pu reprocher autre chose que d’être trop bien mises et d’une élégance trop voyante, pour emprunter au style figuré des modistes et des couturières cet hypallage qui leur sert à désigner tout objet ou toute couleur qui attire l’œil.
La troupe joyeuse ou du moins turbulente s’engouffra dans l’escalier, et les passants attirés par ce fracas purent entendre, pendant quelques minutes, des éclats de voix et de rire qui les firent penser en soupirant aux voluptés sans nombre qu’allaient savourer ces fortunés mortels. – Les postillons, mis en belle humeur par les cinq francs de guide qu’ils venaient de recevoir, s’en retournèrent en faisant le plus triomphant vacarme du monde par manière de remerciement.
Une table somptueuse, servie dans le salon rouge du premier étage, attendait les convives, qui se placèrent avec un hasard un peu arrangé d’après les sympathies, les droits et les aversions de chacun."
Henri et Calixte s'aiment depuis toujours et sont promis au mariage. Mais Henri est victime d'un chantage de la part d'une courtisane, Amine, et de Rudolph qui se dit son ami...